Bulletin n° 23 – Éditorial

Justice alimentaire et souveraineté alimentaire aux USA

La souveraineté alimentaire est apparue pour la Via Campesina comme la réponse la plus audacieuse aux régimes du libre commerce qui détruisent partout dans le monde les moyens de subsistance. Elle a été reprise largement à travers les pays du Sud par des communautés qui naviguent entre les agro-carburants, l’accaparement des terres et la « privatisation de tout ». Une des raisons de la popularité du concept de souveraineté alimentaire est le fait que la mondialisation néolibérale a concentré presque la moitié de la richesse de la planète dans les mains d’à peine 80 individus. La souveraineté alimentaire est le cri face à cette dépossession.
Une autre raison réside dans le fait que la souveraineté alimentaire reflète la profonde résistance des peuples dans la lutte contre l’exploitation, l’oppression et la colonisation. Quand des communautés qui se battent pour leurs droits découvrent les principes de la souveraineté alimentaire, ils réagissent souvent en s’exclamant ; «Oui ! C’est ce que nous faisons !». Sur les lignes de front, les racines communes de la résistance sont vite identifiées.
La justice alimentaire est une des ces luttes. Les racines radicales de la justice alimentaire aux Etats Unis sont très profondes dans le mouvement de libération noire. Dans les années soixante, en continuité avec les traditions historiques de prise en charge autonome des communautés afro-américaines, les Black Panthers (Les Panthères Noires) ont fourni de la nourriture, des soins de santé, du logement et de l’éducation dans leurs quartiers, en les confiant au contrôle de la communauté. L’alimentation était un des axes parmi une plateforme plus large pour la libération : être libre de famine et de brutalités policières étaient des droits souverains.

Eric Holt-Giménez, Food First