L’Agroécologie, véritable innovation réalisée par et pour les peuples
Ilustration: Institut latino-américain d’Agroécologie – “Tierra del maíz”.
Il est impossible d’ignorer la crise qui frappe le système alimentaire industriel. Pendant plus de dix ans, études après études ont confirmé les résultats avancés en 2007 par le mouvement pour la Souveraineté Alimentaire, à savoir, que le système alimentaire industriel détruit la vie. Désormais, les gouvernements s’attachent à trouver des « innovations » dans le secteur agricole capables de remédier à la crise. Ils espèrent que le salut viendra d’une nouvelle Révolution Verte : des innovations scientifiques et technologiques permettant d’accroître la production sans épuiser les ressources ou polluer notre environnement. Il est évident que ce genre d’innovations permettra aux entreprises de l’agroindustrie de conserver la mainmise sur les ressources naturelles, génétiques et économiques, et de préserver le statu quo dans les discours officiels sans admettre que la faim tire son origine non pas d’une production alimentaire insuffisante mais plutôt de la pauvreté, de l’absence de démocratie, de l’exclusion des groupes vulnérables, d’obstacles physiques ou inégaux (par ex. lors de situations de conflit ou pour les populations déplacées) entravant l’accès à l’alimentation, aux ressources naturelles et aux infrastructures.
À l’opposé, l’Agroécologie, inscrite dans la Souveraineté Alimentaire, gagne, aussi, rapidement du terrain et est de plus en plus mise en avant comme approche permettant de transformer l’agriculture et les systèmes alimentaires ainsi que de répondre aux défis qui nous font face. Le mouvement pour la Souveraineté Alimentaire révèle comment l’argumentaire sur l’innovation est en fait un moyen visant à dépolitiser le débat sur ce que devrait être un nouveau système alimentaire, car ce discours omet de fixer les critères auxquels doit répondre l’innovation. Ainsi, l’Agroécologie se retrouve sur le même plan que les OGM, les nouvelles technologies de sélection génétique, « l’agriculture intelligente face au climat » et « l’intensification durable ». Or, ces modèles s’approprient certaines pratiques agroécologiques et les associent aux semences brevetées, aux plantes et animaux transgéniques, aux monocultures destinées au commerce international, et, plus important encore, au projet inchangé d’accumulation des fruits issus de notre planète et des travailleuses et des travailleurs. Dans ce numéro, nous examinons les éléments de l’Agroécologie telle que définie par les femmes et les hommes engagé-e-s dans la production vivrière à petite échelle qui font d’elle la seule véritable innovation en mesure de transformer notre alimentation et l’agriculture.
Amis de la Terre international
[La présente édition a été réalisée en collaboration avec le CIP et LVC]