Mémorandum des Organisations paysannes, pêcheurs, pastoralistes, peuples autochtones et autres membres des organisations de la Société civile africaine

Dans le cadre du Forum Mondial sur la Souveraineté Alimentaire « Nyéléni l -2007 », tenu du 23 au 27 février 2007 à Sélingué, Mali, les organisations Paysannes, de pêcheurs, de pasteurs, de peuples indigènes et autres organisations de la société civile africaine, ont eu a partager et analyser les préoccupations africaines en rapport avec la Souveraineté Alimentaire, leurs initiatives respectives et exploré des perspectives communes.

Conscients des rôles et responsabilités qu’elles doivent jouer pour amener un changement des politiques libérales en faveur de celles fondées sur la souveraineté alimentaire et permettant de préserver les moyens d’existence des exploitants familiaux, de réduire effectivement la pauvreté et l’insécurité alimentaire les organisations Paysannes, des pêcheurs, pasteurs, des peuples autochtones et des autres organisations de la société civile africaines ont adopté le présent document, dit Mémorandum de Sélingué.

Considérant que l’Afrique dispose de ressources biologiques locales pouvant nourrir convenablement toutes ses populations,

Préoccupés par les importations croissantes de produites alimentaires et agro-alimentaires qui accentuent la dépendance alimentaire et fragilisent l’économie et le tissu social de l’Afrique,

Préoccupés par l’insuffisance et l’inadéquation des investissements publics dans les secteurs productifs agricole, animal, halieutique et forestier au niveau sous régional et régional,

Convaincus que ces secteurs productifs constituent le ressort du développement économique et social durable,

Convaincus que la Souveraineté Alimentaire ne saurait être atteinte sans une protection adéquate des productions et des marchés locaux, nationaux, sous-régionaux et Africains contre les politiques de dumping pratiquées par les pays développés et émergents,

Nous, organisations paysannes, des pêcheurs, pasteurs, des peuples indigènes et autres membres de la société civile africaine,

Dénonçons les règles actuelles du commerce international, les politiques libérales imposées par les coopérations bilatérales et multilatérales qui engendrent la pauvreté de masse, l’insécurité alimentaire, la destruction des ressources naturelles et la déstructuration des sociétés agricoles et rurales africaines.

Exigeons de nos Etats et de l’UE un moratoire sur les APE en cours de négociation entre l’UE et les différentes régions d’Afrique et la suspension des accords actuels de pêche qui constituent une stratégie de pillage des ressources halieutiques, engendrant des conséquences écologiques irréversibles et une paupérisation des exploitants familiaux vivant de la pêche artisanale.

Revendiquons le droit à l’information accessible pour tous les acteurs de développement à tous les niveaux et l’établissement d’un véritable dialogue social, notamment à travers la traduction dan nos principales langues des textes relatifs aux APE,

Exigeons des différents protagonistes de ces APE, l’instauration des mécanismes pour une évaluation participative des effets de ceux-ci, sur les conditions de vie et de production des populations paysannes.

Demandons aux Etats de veiller à la préservation de la richesse et de la biodiversité de nos pays et exigeons un moratoire sur les OGM et le refus des politiques de privatisation des semences et de brevetage du vivant impulsées par les multinationales,

Exhortons les autorités Africaines à plus d’engagement politique pour parachever et renforcer les processus d’intégrations sous-régionale et régionale, gage d’un développement harmonieux et durable du continent,

Exhortons les chefs d’Etats Africains à signer les résolutions et accords en faveur des peuples autochtones pour leur préserver leurs droits à être différents à travers le respect de leurs cultures et de leurs modes de vie, ce qui leur permettra d’atteindre leur Souveraineté Alimentaire,

Soutenons les positions des réseaux des organisations paysannes et des producteurs agricoles de l’Afrique et les autres acteurs de la société civile de ce continent engagés dans le combat pour la Souveraineté Alimentaire et saluons les efforts de ceux qui par leur lutte et leur abnégation ont pu faire prendre en compte la Souveraineté Alimentaire dans les politiques agricoles sous régionales,

Adhérons aux conclusions de l’appel de Niamey et suggérons l’élaboration et la mise en œuvre participative d’une charte Africaine de Souveraineté Alimentaire,

Engageons nous à œuvrer pour la mise en application des engagements des chefs d’Etats Africains exprimés à Maputo de consacrer au moins 10% des budgets de leurs Etats au financement des secteurs productifs agricoles, pastorales, halieutiques et forestiers,

Invitons les Organisations paysannes, des pêcheurs, pasteurs, des peuples indigènes et autres membres des sociétés civiles des autres pays et sous-régions de l’Afrique à renforcer un dialogue citoyen, multi acteurs à tous les niveaux, pour la prise en compte de la Souveraineté Alimentaire dans les politiques agricoles et commerciales nationales, sous-régionales et Africaines,

Adhérons aux résolutions et recommandations de Sélingué pour lesquelles nous nous engageons à porter dans nos pays et sous-régions respectifs et au niveau Africain à travers une approche participative, dans l’intérêt des générations actuelles et futures,

Engageons nous avec les organisations paysannes, des pêcheurs, pasteurs, peuples autochtones du Mali, à faire du « Village Nyéléni », un espace d’échanges, de formation, de dialogue et de tolérance mutuelle entre ceux qui portent le discours sur la Souveraineté Alimentaire et ceux pour qui ce discours est porté

Sélingué, le 27 février 2007

LE FORUM