Un poème

Espoir fugace

Il est dur d’avoir de l’espoir. Et malgré le temps qui passe,
il reste insaisissable. Car il ne dépend pas seulement du bonheur
mais reste ancré dans ces mirages de solitude au cœur de la nuit.
Cela nous surprendra surement, mais vous aussi, vous avez cessé de
croire en la réalité immuable du futur,
et l’espoir n’en est que plus insaisissable lorsqu’il n’est plus concevable
ni souhaité. Mais ne tergiversons plus.
La jeune génération demande à l’ancienne d’espérer. Alors que leur direz-vous?
Ayez l’honnêteté de leurs dire ce que vous vous dites à vous-mêmes.

Car égoïstement nous avons préféré considérer nos vies avant même
de considérer ce qui nous fait vivre, les forêts sont ruinées, les champs rongés,
les courants pollués, les montages écroulées. L’espoir
est alors d’appartenir à un endroit en ayant connaissance
de ce qui le différencie de tout autre endroit, et,
en le chérissant plus que n’importe quel autre, cette connaissance
ne pourra nous être enlevée, ni par la force, ni par l’argent.
Grâce à elle, vous n’entendrez plus les influents lorsqu’ils
qui réclameront votre foi, vous n’entendrez plus les riches lorsqu’ils exigeront vos terres
ou votre labeur. Restez marmoréen face à eux et préférez écouter
la mélodie des rivages, la mélopée des arbres et le chant des grands espaces.

Trouvez votre espoir, celui-là même que vous foulez à chacun de vos pas.
Votre espoir du Paradis, laissez-le reposer ici-bas.
Le monde n’est pas mieux que les endroits qui le constituent. Et, enfin,
ces endroits-là, ne sont pas mieux que leurs peuples alors que les peuples
les habitent. Si les peuples assombrissent la lumière
qu’ils portent en eux, alors le monde s’obscurcit.

Wendell Berry (Traduction non officielle de l’anglais)