L’écho des campagnes

L’écho des campagnes 1

Une maison de semences locales dirige la lutte pour la souveraineté alimentaire en Palestine

Syndicat de comités de travailleurs agricoles, Palestine

Dans les territoires occupés de Palestine, une maison de semences locales œuvre à la récupération des semences et de la biodiversité en tant que biens communs et publics depuis le début des années 2000.

La maison de semences locales est sans aucun doute, l’action la plus significative qui contribue à l’accomplissement de la souveraineté alimentaire en Palestine. Établie à Hébron en 2003, par le Syndicat de comités de travailleurs agricoles (UAWC), cette maison est la première et la seule de ce type en Palestine. Y sont sauvegardées, protégées, préservées, stockées et reproduites 45 variétés de légumes et de plantes locales venant de 12 familles de plantes dont beaucoup sont menacées d’extinction. On y trouve des semences de blé, d’orge, de froment, de chou-fleur, de rutabaga, de niébé, d’aubergine, de courge, d’okra, de courge amère, de concombre serpent. Toutes ces semences proviennent directement de paysans palestiniens et sont soumises à un processus de vérification de deux ans avant d’être stockées et mises à disposition d’autres paysans.

La maison est composée de 4 unités : une pièce de réception des semences, un laboratoire, un séchoir et une pièce de stockage où les semences sont stockées pendant cinq années au plus. Afin de protéger cet énorme patrimoine génétique d’évènements catastrophiques, des échantillons de ces semences sont également stockés à long terme à des température inférieures à zéro. Après avoir consigné les performances des semences : pourcentage de germination, croissance et floraison des plants, l’UAWC offre ces semences gratuitement aux paysans palestiniens, au moins deux saisons par an.

Cela contribue à l’augmentation des revenus des paysans. En outre, grâces à ces semences, les paysans luttent mieux contre les effets de l’accaparement de l’eau par l’occupation israélienne, ainsi que contre le réchauffement climatique, car elles sont résistantes à la sécheresse et ne requièrent pas d’irrigation. A l’opposé des variétés de semences hybrides vendues par les sociétés israéliennes et multinationales telles que Bayer-Monsanto, les semences paysannes sont fertilisées par un fumier animal et ne requièrent ni pesticide chimique ni herbicide à base de glyphosate.

« Nous avions l’habitude d’acheter des semences à coût élevé aux sociétés israéliennes » dit Mahmoud Abu Kharatabel, paysan et membre de l’UAWC de longue date. « Mais, aujourd’hui, grâce à la banque de semences, nombre d’entre nous peuvent planter entre 90 et 95 pour cent de semences locales » déclare-t-il avec fierté.

La maison de semences travaille avec des paysans d’importance-clé tel que Abu Kharatabel, qui ont établi une procédure en trois étapes. Une fois que le paysan a reçu les semences, les a plantées et récoltées, les nouvelles semences sont divisées en trois groupes. Le premier groupe appartient au paysan pour ces besoins de l’année présente. Le deuxième groupe est stocké et sera planté pendant la saison suivante. Et le troisième groupe revient à la maison des semences pour le bénéfice d’autres paysans et pour continuer à construire la souveraineté alimentaire en Palestine.

« Quand un paysan a ses propres semences et peut les reproduire, cela veut dire qu’il peut choisir quoi planter et quand planter » explique Do’aZayed, coordinatrice de la banque de semences de l’UAWC « Voilà pourquoi nous avons établi cette maison de semences locales », puis elle a résumé ainsi : « la souveraineté semencière est la première étape de la souveraineté alimentaire ».

L’écho des campagnes 2

Prendre soin c’est également pouvoir expérimenter

Communauté Niagui, Sénégal

Les rives du fleuve Casamance abritent des kilomètres de mangroves. Mariama Sonko nous montre les structures en bois où s’accrochent les huîtres[1] que les paysan(ne)s de la région de Ziguinchor élèvent dans le cadre de leurs moyens de vie et de leur souveraineté alimentaire. Il s’agit de la communauté de Niagui, sur la côte atlantique de l’Afrique, au Sénégal. Nous sommes dans la savane, avec une multitude d’arbres, d’arbustes et de zones humides.

Les habitants de Niagui sont très impliqués dans leur souveraineté alimentaire, avec des semences qui leur permettent de cultiver leurs propres aliments. Mariama Sonko, l’une des membres de la communauté qui poursuit la tradition de conserver les semences, nous montre les rangées de pots en terre cuite de différentes tailles alignés sur les murs en pisé d’une maison dans un quartier de la communauté : “La terre cuite régule la température, ce qui est fondamental pour conserver les semences. Nous fabriquons des récipients spéciaux et en les stockant ainsi, nous les échangeons plus facilement. Les femmes fabriquent les pots avec leurs couvercles en inscrivant différentes phrases sur les côtés pour nous aider à réfléchir sur les semences et leur importance.”

Mariama Sonko précise qu’ils n’ont pas l’intention de promouvoir les banques de semences, ” parce que le plus important est la conservation à long terme des semences ” actives “, c’est-à-dire des semences qui sont en permanence dans les champs, et qui sont semées et échangées entre récolte et récolte. L’une des variétés de riz, la plus répandue dans la région, est la variété “brikissa”, qui est échangée tout le temps et dure environ 50 jours avant d’être semée”.

C’est avec une grande fierté qu’elle poursuit son histoire : ” C’est une de ces femmes, qu’en ville on appelle ” analphabète “, qui a commencé à reconstituer les variétés traditionnelles, car elle a compris que les variétés ” améliorées “, conventionnelles, commerciales, érodaient nos semences traditionnelles, beaucoup plus résistantes et adaptables aux aléas du climat et à l’humidité. Ce sont les femmes qui transmettent le soin et la connaissance de nos semences de génération en génération. Elles proviennent de la confiance que nous avons en nous-mêmes.

Les semences conventionnelles ne permettent pas aux gens d’observer, de calculer, d’expérimenter, parce qu’elles viennent avec des prescriptions précises qui nous enlèvent toutes possibilités. Nous parlons d’une vingtaine de variétés de riz, plus du sorgho, du maïs et du mil. Nous ne voulons pas centraliser les soins. Nous favorisons l’autonomie parce que les conditions changent, la fertilité des sols se perd, il y a un manque de précipitations, il y a une demande de semences. Nous maintenons les pratiques, mais les conditions changent.

[1] Dans les mangroves, les agriculteurs cultivent des huîtres sur des cordes tissées sur des cadres.

Encadres

Encadré 1

Adoptez Une Semence, une action pour la vie

Le 16 octobre 2018, La Via Campesina a relancé sa Campagne mondiale « Semences paysannes, patrimoine des peuples au service de l’humanité », pour ce faire elle a appelé à l’action Adopte Une Semence. Comment y participer ?

Nous cherchons à ce que chaque paysan(ne) ou communauté s’engage à adopter une variété de semences, quelle que soit sa culture. Celle qui suscite le plus d’intérêt, pour son identité, son territoire ou dans le cadre de l’affirmation de la vie et de la culture paysannes. Chaque participant doit devenir le gardien de cette semence et le garant de sa propagation. L’idée est de créer un grand réseau de semences paysannes, de récupérer des semences et d’étendre la production pour atteindre la Souveraineté alimentaire des peuples.

Grâce à cette action, nous voulons que des milliers de communautés renforcent la biodiversité et récupèrent les variétés, garantissant ainsi la souveraineté alimentaire et la capacité de production. Il s’agit d’une action pour la vie, afin d’empêcher les multinationales de s’approprier les semences paysannes, de diminuer notre autonomie et notre biodiversité. Sans semences paysannes, l’agriculture paysanne devient l’otage des multinationales !

Vous pouvez commencer par votre communauté et inviter d’autres personnes, l’important est de faire le premier pas ! Nous voulons en savoir plus sur votre communauté et la variété récupérée, écrivez-nous à :
lvcweb@viacampesina.org

Nos semences paysannes
La semence paysanne a une valeur inestimable. Elle est synonyme d’autonomie pour les intrants et la prise de décisions, car si nous possédons des semences, nous décidons quand et comment les planter.
Les semences sont le lien pour la continuité de l’agriculture paysanne et la production d’aliments sains pour les travailleurs/travailleuses et les consommateurs/consommatrices. Nous parviendrons à la souveraineté alimentaire que si les semences sont sous la protection des paysans, des communautés et des peuples du monde.
Développer cette action, c’est garantir le droit à une alimentation de qualité pour la campagne et la ville !

Encadré 2

Lutte pour les droits semenciers : de nouvelles menaces pour le Traité sur les semences

Le Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture (Traité sur les semences) a été adopté en 2001 et est entré en vigueur il y a 15 ans. C’est le seul instrument mondial, multilatéral, obligatoire de gouvernance qui reconnaisse les droits collectifs des paysans à leurs semences. Le Traité facilite et règlemente l’accès aux semences -patrimoine commun de l’humanité- stockées dans des banques de gènes liées au Système multilatéral et qui garantit leur disponibilité pour les générations futures.

Bien qu’il s’agisse d’un compromis déséquilibré et instable, le Traité reflète les rapports de force et les opinions de : (1) l’industrie semencière exigeant un accès facilité aux semences paysannes tout en promettant de partager les avantages monétaires et non-monétaires ; et (2) les paysans demandant des garanties pour leurs droits collectifs à sauvegarder, utiliser et échanger les semences ainsi que pour les générations futures. L’industrie a lamentablement échoué à tenir sa promesse de partager les avantages, et elle a, en plus, renforcé les législations de protection des variétés de plantes qui violent les droits de paysans. En conséquence, en 2013, les parties contractantes ont décidé de mettre en place un groupe de travail visant à améliorer le fonctionnement du système multilatéral et un Accord de transfert de matériel (ATM : L’Accord de transfert de matériel est un modèle obligatoire pour les parties qui désirent offrir ou recevoir du matériel dans le cadre du système multilatéral.) permettant d’avoir accès aux RPGAA (Ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture).

Nouvelles menaces
La récente révolution technologique en génomique a rendu le séquençage d’information génétique de semences très facile et abordable. Aujourd’hui la biotechnologie avancée est capable de créer de nouvelles semences en utilisant uniquement des informations de séquençage numérique (DSI) acquises par les semences physiques. Cette nouvelle technologie perturbe le lien entre le matériel (germoplasme) et ses résultats dérivés [Dématérialisation]. La création de nouvelles populations ou variétés, utilisant uniquement le DSI, et leur brevetage, va augmenter les cas de biopiraterie et va grandement limiter les droits des paysans sur leurs semences. C’est le moyen le plus facile d’accélérer l’érosion de la biodiversité et de menacer notre futur.

Le système multilatéral du Traité n’offre pas, à l’heure actuelle, de réponse adéquate aux technologies génétiques qui sont à la disposition de l’industrie. Sa portée n’est pas suffisamment définie, il faudrait clarifier si le DSI doit être considéré selon les règles du ATM ou si les RPAA, telles qu’elles sont définies par les termes du Traité n’incluent pas le DSI. Si des décisions rapides ne sont pas prises ou tout au moins des discussions engagées à ce sujet, l’industrie aura un accès libre aux informations de séquençage génétique à volonté, profitant de cette lacune dans les réglementations.

Le DSI pose également de nouveaux défis aux mouvements sociaux, qui doivent concevoir de nouvelles stratégies pour parer à cette nouvelle forme de capture. Jusqu’à présent, il est bien clair que les plus grands bénéficiaires de ce « patrimoine de l’humanité » dans les banques de gènes sont les industries semencières. La plupart des pays les plus développés sont complices dans ces nouvelles menaces, car ils travaillent la main dans la main avec l’industrie pour s’approprier les ressources phytogénétiques existantes pour l’agriculture et l’alimentation par le biais de brevets. Cependant, les paysans souhaitant gérer de façon dynamique leur biodiversité bénéficieraient d’un système multilatéral effectif et un ATM efficace.

La Via Campesina et ses alliés ont rejeté et dénoncé les nouvelles tentatives de l’industrie d’utiliser la biologie synthétique et le génomique pour contourner les réglementations du Traité et enfreindre l’article 9 du traité sur les semences relatif au droit des paysans à sauvegarder, utiliser, échanger et vendre leurs semences, ainsi que la Convention sur la diversité biologique (CDB), dans ses protocoles et la Commission sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture. Nous dénonçons fortement cette stratégie de l’industrie qui apparait clairement dans les pays développés et parmi d’autres organisations.

Nous rappelons aux Parties contractantes du Traité et aux autres espaces de prise de décision d’intervenir et de considérer les obligations des régimes privés de propriété intellectuelle comme appartenant à la sphère des droits économiques et de respecter l’application effective des droits des paysans qui émanent de la sphère des droits humains.

Il y a deux grands moyens d’empêcher l’appropriation de toute la diversité agricole et du contrôle de la chaine alimentaire par les sociétés multinationales : (1) assurer la prédominance des droits des paysans sur les droits des obtenteurs et des détenteurs de brevets et (2) faire respecter le droit des peuples à définir eux-mêmes ce dont ils ont besoin pour garantir leur souveraineté alimentaire.

Les négociations lors de la dernière réunion de l’Organe directeur du Traité ont démontré que le bloc des pays industrialisés se refuse à discuter de cette question et veut la reporter à plus tard, menaçant le multilatéralisme qui caractérise le système onusien ; plus particulièrement les États-Unis qui présidaient la session, et ont biaisé les procédures de discussion. Une nouvelle possibilité de discuter de cette question se présentera lors de la CDB où La Via Campesina et ses alliés feront pression pour défendre les droits des agriculteurs familiaux de petite échelle et des générations futures.

Encadré 3

Droits paysans et notre lutte pour les semences

L’article 19 de la Déclaration des Nations Unies sur les Droits des paysans et autres personnes travaillant dans les zones rurales (UNDROP – La Déclaration des Nations Unies sur les Droits des paysans et autres personnes travaillant dans les zones rurales a été officiellement adoptée par l’Assemblée générale de l’ONU en décembre 2018.) reconnait le droit des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales à maintenir, contrôler, protéger et développer leurs propres semences et leurs savoirs traditionnels. Selon ce même article, les paysans et autres personnes travaillant dans les zones rurales ont droit à : (1) la protection de leurs savoirs traditionnels ; (2) participer de façon équitable au partage des avantages émanant de l’utilisation des ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture (RPGAA) ; (3) participer à la prise de décisions relatives à la préservation et à l’utilisation durable des RPGAA ; (4) sauvegarder, utiliser, échanger leurs semences ou tout matériel de propagation préservés à la ferme.

En outre, l’UNDROP demande aux États de s’assurer que les paysans ont suffisamment de semences de bonne qualité et à des prix abordables à leur disposition à l’époque de la plantation. Les paysans doivent pouvoir être autonomes en ce qui concerne leurs propres semences ou d’autres semences ou variétés disponibles localement qu’ils désirent cultiver.

Selon les termes de la Déclaration, les États sont responsables de la prise de mesures appropriées visant à soutenir le système semencier paysan et à promouvoir l’utilisation des semences paysannes et l’agro-biodiversité, s’assurant que la recherche et le développement agricole prennent en compte les besoins des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales. Cela signifie que les paysans doivent être inclus dans la définition des priorités et dans toute action de recherche et développement, leur expérience doit être prise en compte.

Enfin, l’UNDROP rappelle aux États qu’ils doivent s’assurer que toutes législations semencières, toutes lois sur la propriété intellectuelle et la protection des variétés de plantes, tous régimes de certification et toutes lois sur le marketing des semences, respectent et prennent en compte les besoins et les réalités des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales.

Encadré 4

Illégaliser nos semences en Amérique Latine

Les gouvernements latino-américains cherchent à homogénéiser légalement les semences. Le Mexique, le Honduras, le Costa Rica, El Salvador, la Colombie, l’Equateur, le Chili, l’Argentine, le Pérou, le Brésil, le Paraguay, le Venezuela, ont proposé et débattu des lois sur les semences. Beaucoup d’entre elles se heurtent à la résistance des communautés, des organisations sociales et des peuples. Ces lois suivent sans réserve les directives définies par les grandes transnationales semencières : Bayer-Mosanto, Corteva-Agriscience, ChemChina (Syngenta), Vilmorin&Cie-Limograin.

Les agences des Nations Unies telles que l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), la Conférence sur le commerce et le développement ou l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle sont des organes importants qui agissent en faveur de ces normes, élaborent des lois types et enseignent aux gouvernements comment les appliquer.

Les lois de commercialisation définissent les critères qui doivent être remplis pour que les semences arrivent sur le marché. Elles ne peuvent être commercialisées que si elles appartiennent à une variété répondant à trois exigences importantes : elles doivent être “distinctes”, “homogènes” et “stables”. Les lois sur la propriété intellectuelle sont des règlements qui reconnaissent qu’une personne ou une entité, une entreprise semencière, est l’unique propriétaire d’une semence présentant certaines caractéristiques et a le droit légal d’empêcher d’autres personnes ou entités de l’utiliser, la produire, l’échanger ou la vendre. Il existe deux grands types de systèmes de “propriété intellectuelle” pour les semences : les brevets et la protection des obtentions végétales, qui confère des droits à quiconque “obtient” une variété, même si sa condition actuelle remonte à des milliers d’années. Les accords de commerce et d’investissement représentent un outil utilisé par les entreprises pour forcer les gouvernements à adopter et à promouvoir les droits des entreprises sur les semences.

Ces lois cherchent donc à rendre illégaux les systèmes locaux, paysans et autochtones d’utilisation, d’échange, de production et d’amélioration des variétés locales. Elles permettent aux entreprises de définir des politiques nationales en matière de semences, de recherche et d’agriculture. Elles créent un système de certification et de surveillance contrôlé par des sociétés privées. Elles obligent les communautés et les peuples à accepter les normes fixées par les transnationales et à être contrôlés par des organismes privés s’ils souhaitent continuer à échanger des semences “légales”. Elles reportent, minimisent ou éliminent tout souci de conservation de la diversité agricole. Elles prétendent réglementer des traditions millénaires d’utilisation et d’échange de semences. Elles imposent des normes industrielles à l’agriculture, facilitant ainsi la privatisation des semences. Elles cherchent à qualifier et à classer toutes les semences, même locales et autochtones, afin que la propriété des semences par les entreprises soit respectée. Ainsi, quiconque produit des semences sera contrôlé, quelle que soit la semence qu’il produit ou la façon dont il l’échange.

Poème

La mission des semences

Une semence de vie tombe dans les bras du vent du Nord,
Née d’un beau fruit charnu,
Gigantesques bourgeonnements de rêves et de luttes !
Femmes brûlées, femmes assassinées,
Femmes en résistance, femmes à la conquête de leurs droits.
Semences multipliées, ressuscitant l’utopie à chaque cycle,
Recourir à la terre de ce monde immense

Aujourd’hui, les semences c’est toi, c’est moi,
Prêtes, en attendant de tomber dans le giron de la Terre-mère,
Ecoute…. Elle te réclame !
Chaque grain de terre est une bouche réclamant justice !
Qui peut supporter le silence de la terre improductive ?
Cimetière vivant de l’espoir, semant haine et exclusion.

Les semences c’est toi, c’est moi,
La charrue -notre organisation – a déjà creusé des sillons dans la terre,
Allons dormir dans cette terre,
Laissons-la nous raconter le secret de la mission !
Sentons la pluie : chacun et chacune de nos camarades se joignent à la lutte.
Qu’en notre sein s’épanouissent le rêve et l’engagement !
Et lorsqu’ils seront trop grands, que nous ne pouvons plus les contenir,
Alors nous éclaterons et ne serons plus semences !

Nous serons militants et militantes, poussant comme les plantes, et nous trouverons
Un grand soleil rouge, brillant au zénith – La nouvelle société !
Et nous sentirons son baiser sur notre bouche.
Alors nous ne serons plus plantes, nous deviendrons fruits !
Nous nous alimenterons de nos luttes et de nos conquêtes,
Nous-mêmes et ceux que nous aimons
Jusqu’au jour de notre mort, tels des fruits mûrs….

Et ces fruits tomberont comme des larmes sur la terre et se transformeront en semences.
Et ainsi de suite, éternellement…
Jusqu’au jour où auront disparu la maudite houe et la faucille de la domination,
Menaçant le bourgeonnement de la terre.
Alors, soulagée elle soupirera et immédiatement la naissance aura lieu :
Nous mangerons,
Nous célèbrerons,
Nous danserons au son de la harpe et des guitares !
Et nous chanterons avec la voix du cœur !

Parce que nos yeux, emplis de tendresse, pourront finalement voir,
La semence enfin transformée en récolte !

(Poème original en espagnol de Daniel Salvado)

Aux premières lignes

Aux premières lignes

Ces entretiens ont été réalisés avec le soutien spécifique de Real World Radio

1. La souveraineté alimentaire s’oppose à la montée du fascisme car elle nous permet d’organiser la vie différemment

« En organisant la vie différemment, en questionnant la manière dont nous nous alimentons et ce que nous mangeons, en soutenant les producteurs et les productrices à petite échelle et en répartissant les tâches domestiques afin qu’elles ne reposent pas exclusivement sur les épaules des femmes, la souveraineté alimentaire nous aide à résister à la montée du fascisme », affirme l’agronome et militante féministe de la Marche mondiale des femmes au Brésil, Miriam Nobre.

Parmi les menaces principales pesant sur la souveraineté alimentaire, elle relève les attaques ciblant les peuples autochtones et la population d’origine africaine qui voient leurs territoires pillés, les persécutions et les violences physiques contre les femmes considérées comme des « sorcières », ainsi que la critique émise par les figures religieuses néo-pentecôtistes à l’encontre des rituels communautaires qui assurent une transmission des savoirs entre les générations, par exemple lors des semis de maïs.

« Aux tentatives menées par les secteurs conservateurs afin de revenir au modèle de la famille patriarcale, s’ajoutent le démantèlement des politiques publiques aidant au maintien des jeunes à la campagne, ainsi que l’alliance entre l’agro-industrie, le trafic de drogues et la militarisation. Tout ceci constitue une menace permanente pour les populations. Nous devons lutter pour le droit des jeunes générations à être paysans et pour qu’ils puissent pratiquer l’agroécologie », ajoute-t-elle.
Intégralité de l’entretien ici.

2. La lutte pour la souveraineté alimentaire : une bataille contre l’offensive fasciste

Figure historique de La Vía Campesina International, le leader paysan Carlos Marentes évoque avec Real World Radio les défis qui se dressent sur la route de la souveraineté alimentaire « en cette période politique caractérisée par une oligarchie et un conservatisme toujours plus extrêmes, des États penchant vers l’extrême droite avec des positions néofascistes terribles, comme aux États-Unis. »

Carlos Marentes est membre de l’organisation Proyecto de los Trabajadores Agrícolas Fronterizos (Projet pour les travailleurs agricoles frontaliers) située à la frontière entre la ville états-unienne d’El Paso, au Texas, et la ville mexicaine de Juárez, dans l’État de Chihuahua. L’organisation fait partie de La Vía Campesina International.

Le dirigeant explique que son organisation aide les travailleurs et les travailleuses ruraux à se syndicaliser pour lutter en faveur de la souveraineté alimentaire. Selon lui, cette lutte s’articule de deux manières : d’une part, le travail contre « cette guerre menée par (le président des États-Unis) Donald Trump et les secteurs les plus rétrogrades de la société qui apparaissent dans différents pays » ; et , d’autre part, la reconstruction de l’économie paysanne et de l’économie des communautés rurales et autochtones, de sorte à éviter les déplacements de population.
Intégralité de l’entretien ici.


3. Une loi controversée sur la citoyenneté en Inde déclenche une nouvelle vague de mobilisations contre l’extrême-droite

Une nouvelle loi sur la citoyenneté et discriminatoire à l’encontre des Musulmans et des franges les plus pauvres de la société indienne a déclenché une vague massive de manifestations qui défient l’extrême-droite et sont essentielles dans la lutte pour les droits à la terre.

« Ils ne veulent pas des Musulmans, ils ne veulent pas des populations tribales, ils ne veulent pas des Dalits (ou« intouchables »qui sont les plus pauvres et les plus discriminés dans le système de castes en Inde), ils ne veulent pas des pauvres ni de la classe ouvrière. Tout ce nationalisme, qui concentre le pouvoir entre quelques mains, doit être contesté », affirme la militante Roma Malik, de l’organisation All India Union of Forest Working People (Union indienne des personnes travaillant dans la forêt), à l’occasion d’un entretien accordé à Real World Radio. « Et je sens que la lutte pour la terre est la lutte fondamentale, où les femmes sont en première ligne ; elles défient déjà le gouvernement fasciste », souligne-t-elle.

La dirigeante considère que la lutte pour la souveraineté alimentaire menée par les organisations paysannes doit veiller à que celles et ceux qui cultivent des aliments jouissent du droit à la terre et à la possession des moyens de production.
Intégralité de l’entretien ici.


4. Les discours fascistes/nationalistes profitent de la crise dans les campagnes européennes pour promouvoir des politiques néolibérales

Paysan au Pays basque et membre du comité de coordination de La Vía Campesina Europe (ECVC), Andoni García alerte, dans un entretien avec Real World Radio, sur le fait que l’utilisation du « sentiment nationaliste » dans les discours politiques de droite est une caractéristique de la montée des forces conservatrices et fascistes sur le continent.

Contrairement à d’autres pays européens, « le gouvernement espagnol ne cache pas qu’il est néolibéral ou qu’il ne soutient pas les politiques publiques ; mais il exploite le sentiment d’abandon et d’impuissance des personnes qui habitent à la campagne ainsi que l’absence de réponse à la crise afin de coopter les agriculteurs et construire un discours xénophobe contre les migrants venant travailler en Europe », affirme Andoni García.

ECVC avertit également de la criminalisation à l’encontre des agriculteurs et des agricultrices (en particulier contre l’élevage) menée par certains mouvements militant en faveur du bien-être animal et a annoncé que les conflits entre les zones urbaines et rurales seront traités au cours de la prochaine assemblée de LVC Europe, prévue en avril 2020.

Pour lutter contre la montée du fascisme, Andoni García indique qu’il faut attirer l’attention sur la Déclaration des Nations Unis sur les droits des paysans et que les partis de gauche doivent réfléchir aux façons de remédier aux problèmes auxquels sont confronté.e.s les paysan.ne.s car la réponse actuelle n’est pas adaptée.
Intégralité de l’entretien ici.

5. Le droit de dire NON

Les femmes rurales du sud de l’Afrique résistent contre l’avancée patriarcale des milices et des gouvernements dictatoriaux dans certains pays de la région, affirme la militante et coordinatrice régionale de la Rural Women’s Assembly (Assemblée des femmes rurales) Mercia Andrews.

« L’Assemblée des femmes rurales s’allie aux mouvements des agriculteurs, aux mouvements paysans, et nous avons rejoint des campagnes revendiquant notre droit à dire NON. Nous avons le droit de déterminer quelle forme prend le développement dans ces zones. Nous avons le droit de dire NON à l’exploitation minière, NON à l’agro-industrie. Nous avons le droit de dire NON à la façon dont les forêts sont rasées », souligne Mercia Andrews.

Les actions menées par l’Assemblée des femmes rurales se concentrent sur la défense des communs, contre l’invasion des multinationales ainsi que l’accaparement des terres et des ressources. La défense de la souveraineté alimentaire et des semences locales est au cœur de leurs luttes et de leurs campagnes.
Intégralité de l’entretien ici.

L’écho des campagnes

L’écho des campagnes 1

Les femmes jouent un rôle essentiel

Evangeline Gonzales, PANGISDA-Women (Progressive Alliance of Fisherfolk in the Philippines,Alliance progressiste des pêcheurs des Philippines), Philippines

La politique néolibérale conduite par l’administration du président Duterte porte atteinte au droit à l’alimentation en poussant à la destruction, à la récupération et à la privatisation des terres et de l’eau. Ces politiques (1) nous volent notre droit à produire notre alimentation, (2) privilégient l’importation comme principale approche pour répondre aux besoins alimentaires locaux, et (3) encouragent le monopole d’une poignée d’entreprises sur la production alimentaire, leur octroyant le pouvoir de dicter les prix des denrées dont la plupart est hors de portée des pauvres. Priver les peuples de leur droit à l’alimentation est une violation de leur droit à la vie. Les femmes sont les plus gravement touchées par ces politiques car elles ont la responsabilité principale de nourrir leurs familles.

Actuellement, un tiers des personnes pratiquant l’agriculture (34,3%) et la pêche (34%) sont considérées pauvres. Cette situation est aggravée par l’autoritarisme de l’administration Duterte. Le gouvernement exerce un harcèlement physique, émotionnel et psychique à l’encontre de tous ceux et de toutes celles qui s’opposent aux politiques de Duterte, comme en témoigne le nombre de dirigeants locaux tués, torturés, criminalisés et intimidés sous ce gouvernement. La confiscation de notre droit à l’alimentation, de notre droit à la liberté de parole et d’expression ainsi que de notre droit à une vie paisible reflète le fascisme de l’administration Duterte.

Nous devons vaincre la peur créée par la tyrannie du gouvernement actuel. Les femmes jouent un rôle essentiel. Elles ont la capacité, la sagesse et la force de contribuer à la lutte contre l’autoritarisme et le fascisme. Au temps de la dictature de Marcos, les gens ont surmonté leur peur et se sont unis dans la lutte pour renverser le gouvernement fasciste. Beaucoup furent tués, emprisonnés ou victimes de disparitions forcées. Pour lutter contre la dictature de Marcos, nous avons dû organiser et sensibiliser la population avec patience, application, prudence et détermination pour bâtir la solidarité et la résistance.

Nous devons encourager la solidarité et la résistance face aux lois et politiques pratiquées contre la population et qui exacerbent la pauvreté et les difficultés que nous connaissons. Une action concrète pour défendre la souveraineté alimentaire consiste à lutter contre des politiques telles que la loi de tarification du riz et les prétendus projets de développement comme la remise en état de la baie de Manille. Nous devons également partager et vulgariser les connaissances, les pratiques et les systèmes des populations en matière de gestion des ressources naturelles. Nous devons soutenir la production locale et contribuer à enrichir les valeurs et principes portés par la souveraineté alimentaire. Nous croyons fermement que les femmes se lèveront, se battront et lutteront pour nourrir leurs familles et leurs communautés, pour le droit des peuples à l’alimentation, pour la souveraineté alimentaire ainsi que pour l’avenir.

L’écho des campagnes 2

Faire progresser l’unité populaire pour résister au conservatisme et construire la souveraineté alimentaire

Francisca« Pancha » Rodriguez, ANAMURI, Chili

Pendant des décennies, l’Association nationale des femmes rurales et autochtones du Chili (ANAMURI) a été au premier rang de la résistance face au néolibéralisme, mais aussi de la construction d’articulations sociales et populaires pour avancer vers la souveraineté de son peuple. Des décennies de construction d’organisations et de mouvements, à travers la formation politique et l’approfondissement de propositions en partenariat avec divers secteurs de la population pour inverser les désastres du « miracle » chilien.

Dire qu’aujourd’hui « le Chili s’est réveillé » ne saurait être expliqué sans le processus d’articulation populaire poursuivi au cours des dix dernières années, en commençant parles mobilisations étudiantes de 2011 jusqu’à la plateforme de lutte contre l’Accord de partenariat transpacifique (ou PTP), laquelle a permis de faire comprendre aux gens ordinaires les conséquences du PTP sur notre droit à l’alimentation et, partant, que la défense de notre souveraineté alimentaire n’est pas seulement l’affaire des paysan.ne.s mais de l’ensemble de la population organisée.

La réaction populaire si forte qu’a suscité l’oppression est le fruit de ce processus d’accumulation politique. En tant que projet de lutte contre le système s’opposant au conservatisme culturel, politique et religieux, la souveraineté alimentaire constitue un outil central afin de pouvoir travailler la souveraineté populaire à partir d’un lieu concret et différent pour la majorité des personnes.

L’écho des campagnes 3

Les principes démocratiques étayent le droit des peuples à l’alimentation

Suraphon Songruk, SPFT (Southern Peasant’s Federation of Thailand, Fédération paysanne du sud de la Thaïlande), Surat Thani, Thaïlande

Les principes démocratiques étayent le droit des peuples à l’alimentation. Par opposition, si un pays est gouverné par un régime autoritaire, les habitants sont privés de leurs libertés politiques et civiles, ainsi que de leurs droits économiques, sociaux et culturels, y compris le droit à l’alimentation. Dans un tel contexte, les pouvoirs politiques et économiques sont concentrés entre les mains d’un régime autoritaire ou oligarchique qui maintient le monopole des productions et des systèmes alimentaires. L’autoritarisme mine les droits des peuples et le contrôle qu’ils exercent sur leurs terres, leurs forêts et leur eau en tant que sources de nourriture. La population perd alors tout droit d’accéder à l’alimentation et de définir son propre système alimentaire.

La souveraineté alimentaire promeut les droits humains et la dignité. Les mouvements populaires peuvent légitimement utiliser ce concept comme moyen, stratégie et objectif pour rassembler personnes et mouvements partageant les mêmes idées afin d’accroître leur pouvoir de négociation. Les habitants peuvent utiliser le concept de souveraineté alimentaire pour protéger leurs territoires et leurs ressources en tant que sources de production alimentaire. Il s’agit d’un concept progressiste qui renforce les luttes des peuples. Il garantit que les personnes puissent accéder à une alimentation sûre et crée un système respectueux de l’environnement.

La souveraineté alimentaire est le principe fondateur de la souveraineté des peuples.
La construction de la souveraineté alimentaire représente le point de départ permettant aux populations de se libérer de l’emprise des entreprises sur l’alimentation. En définitive, la souveraineté alimentaire donne aux mouvements populaires et aux producteurs et productrices d’aliments à petite échelle les moyens d’agir pour résister à l’autoritarisme.

L’écho des campagnes 4

Les entreprises privées et l’armée travaillent ensemble

Monsieur Suon Sorn, village d’Ou Kansaeng, commune de Samraong, municipalité de Samraong, province d’Oddar Meanchey, Cambodge

Prétextant le conflit frontalier entre le Cambodge et Thaïlande, la dictature politique a mis en œuvre une ordonnance qui autorise l’armée à être basée à l’intérieur de nos forêts communautaires. L’armée rase les forêts et vend les terres à de puissants fonctionnaires hauts placés au sein du gouvernement, à des compagnies privées ainsi qu’à d’autres groupes privilégiés. Ces personnes volent aux populations les forêts, leurs ressources en eau et leurs systèmes alimentaires locaux, ce qui porte atteinte à leur droit à l’alimentation. Selon la structure de gouvernance du Cambodge, le contrôle et le pouvoir central appartiennent à l’armée, et il est très difficile pour les habitants de s’opposer aux militaires. Le gouvernement ne prête aucune attention aux problèmes de la population, dont les droits à l’alimentation, à la terre, à l’eau et aux ressources naturelles sont bafoués.

Entreprises privées et armée travaillent ensemble : les entreprises paient l’armée, et en retour l’armée les protège. Si nous restons dépendants de ces entreprises, nous courrons au désastre. La souveraineté alimentaire est un élément important pour soutenir et renforcer nos communautés ainsi que pour lutter contre ce qu’imposent les militaires et les entreprises. Ces dernières vendent des produits agricoles dangereux, notamment des engrais, des semences et d’autres intrants. Nous devons revenir à la voie naturelle et écologique. Si nous n’achetons pas les produits proposés par les entreprises, elles ne feront pas de bénéfices et ne seront plus en mesure de soutenir l’armée. Nous pouvons commencer par de petites actions, construire la solidarité et le partage au sein de la population, et contribuer à changer le système en partant du niveau local. Au Cambodge, l’idée de « souveraineté » peut être difficile à comprendre, au début, pour la société civile et les différentes communautés, mais grâce à l’éducation populaire, la formation, le partage des connaissances et les discussions sur les principes et les valeurs de la souveraineté alimentaire, de plus en plus de personnes rejoindront le mouvement.

L’écho des campagnes 5

L’agriculture en Palestine, pilier de la solidité et de la souveraineté

Joseph Schechla et Murad al-Husani, HLRN (Réseau pour le droit au logement et à la terre), Palestine

Les paysan.ne.s palestinien.ne.s constituent la première ligne de résistance à l’occupation et la colonisation, bien plus efficace que de piètres négociations. En effet, selon les Accords d’Oslo, la majorité des terres agricoles en Cisjordanie (67%) est classifiée comme faisant partie de la « zone C ». Ces terres sont sous le contrôle direct de l’armée d’occupation. Dans cette région, les occupants cherchent à concentrer la population palestinienne dans les centres urbains des dénommées zones A (la croupe de l’État palestinien) de sorte à empêcher sa présence sur les terres.

Les forces israéliennes décrètent des ordonnances militaires qui se substituent à la loi souveraine (en violation directe de l’article 43 de la Convention de La Haye) et entravent tous les aspects du secteur agricole, ce qui empêche la population palestinienne d’accéder à ses terres et de les cultiver. Cela provoque l’abandon et la dégradation des terres agricoles, à la suite de quoi Israël impose un prétexte « légal » selon le quel ces terres sont « inexploitées ». Ce cercle vicieux doublé d’une impasse juridique conduit à transférer la propriété foncière à « l’État » (occupant). Les statistiques suivantes montrent l’ampleur et la férocité de l’attaque de l’occupation israélienne contre l’agriculture locale :

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Ces statistiques indiquent clairement comment l’occupation s’emploie à supprimer l’agriculture comme moyen efficace de résistance contre la colonisation. Ce sont les mains fermes et constantes des paysan.ne.s plantant les oliviers emblématiques dans la terre occupée de Palestine, ce sont leurs pieds qui confèrent à la terre sa fertilité. Le souffle des paysan.ne.s apporte brillance et saveur aux fruits, car il existe une relation symbiotique entre le paysan palestinien et la terre qui crée une identité que rien ne saurait effacer.

Sous les feux de la rampe

Sous les feux de la rampe 1

Campagne mondiale “Semences paysannes : patrimoine des peuples au service de l’humanité”, un moyen de promouvoir la souveraineté alimentaire

Les semences paysannes sont le patrimoine des peuples au service de l’humanité. Les semences représentent la vie, la base de la production alimentaire mondiale, elles sont essentielles afin que les paysans produisent une alimentation saine correspondant à leur culture et cruciales pour les consommateurs et les citoyens qui recherchent une alimentation saine et variée. Les semences font partie de la culture paysanne, elles sont notre héritage, elles nous permettent de résister, de maintenir notre sagesse ancestrale et de défendre notre identité paysanne.

Cependant, sous couvert d’« amélioration » de la productivité des semences, les industries agroalimentaires ont créé un système semencier néolibéral qui a homogénéisé, appauvri et monopolisé les semences, causant ainsi la perte des trois quarts de la diversité des semences et annihilant une diversité que les peuples – grâce au travail des paysans – avaient mis 10 000 années à créer.

Trois sociétés Monsanto-Bayer, Syngenta-ChemChina et Dupont-Dow, contrôlent plus de 50% des semences commerciales du monde – il s’agit, de plus en plus, de semences génétiquement modifiées pour résister aux herbicides et produire des insecticides. Sous l’impulsion de l’OMC (Organisation mondiale du Commerce), la Banque mondiale et le FMI (Fonds monétaire international) et par le biais d’accords de libre-échange et de législations semencières protégeant les droits des obtenteurs telles que l’UPOV (Union pour la Protection des Obtentions végétales), ce système semencier permet uniquement la circulation de ses propres semences, et criminalise la sauvegarde, l’échange, l’utilisation, le don et la vente des semences paysannes locales. La situation est telle que les paysans ont perdu le contrôle sur les semences locales, qu’ils sont criminalisés quand ils utilisent et échangent leurs semences du patrimoine et sont fréquemment sujets à des rafles et à des confiscations de leurs semences. La biodiversité est menacée par l’utilisation d’engrais chimiques, de semences hybrides et d’organismes génétiquement modifiés – y compris les conséquences des nouvelles techniques d’obtention- développés par les sociétés multinationales. Les citoyens n’ont accès à une alimentation saine, variée et appropriée à leur culture, qu’avec difficulté.

La Via Campesina et ses alliés luttent pour changer cette situation. Dans le cadre de sa campagne mondiale « Semences paysannes : patrimoine des peuples au service de l’humanité » lancée à Rome en 2001, La Via Campesina et ses organisations membres ont réalisé des formations, des campagnes d’éducation, de soutien mutuel et d’échange de semences. Le mouvement paysan continue à lutter pour que les législations nationales et les traités internationaux garantissent le droit des paysans à sauvegarder, utiliser, échanger, vendre et protéger leurs semences contre le bio-piratage et la contamination génétique ; nous écrivons des livres sur l’histoire des semences, nous effectuons des études et des cartographies. Le réseau mondial d’écoles agroécologiques de La Via Campesina organise également des foires d’échange de semences. La campagne mondiale promeut ainsi la récupération des systèmes traditionnels pour la préservation, le maintien et l’échange des semences locales et le droit collectif inaliénable des paysans sur leurs semences.

Le 16 octobre 2018, lors de la Journée internationale d’action pour la souveraineté alimentaire des peuples et contre les multinationales, La Via Campesina a intensifié sa campagne en appelant à une action coordonnée nommée « Adoptez une semence[[Pour de plus amples informations se référer à l’encadré 1 de ce document.]] » . Le mouvement en appelle à chaque paysan/ne, chaque famille paysanne ou communauté pour qu’ils s’engagent à adopter une variété de plante, à devenir le gardien de cette semence, à en assurer sa propagation, reproduction et distribution et à s’engager dans la défense collective de leurs droits à les utiliser, échanger, vendre et protéger. Jusqu’à présent, des paysans du Brésil, de la Palestine, du Paraguay, de l’Inde, de Thaïlande, du Zimbabwe, de la Corée du Sud, de l’Indonésie du Canada et de plusieurs autres pays.se sont engagés dans la préservation de variétés natives et dans la formation d’autres paysans aux techniques agroécologiques – par des actions directes et des foires de semences.

Sans semences, il n’y a pas d’agriculture, sans agriculture, il n’y a pas d’alimentation, et sans alimentation il n’y a pas de peuple !

Sous les feux de la rampe 2

L’action “Adoptez une semence” parcourir le monde et les territoires

Les semences paysannes sont un patrimoine des peuples au service de l’humanité. C’est une position du mouvement paysan international et aussi le nom de la campagne lancée par La Via Campesina pour défendre et préserver les semences paysannes. Dans le cadre de cette campagne, La Via Campesina a lancé plusieurs fois et dans plusieurs régions du monde l’action “Adoptez une semence” appelant les paysans et les familles paysannes à échanger et multiplier des semences paysannes.

Lors de la journée internationale d’action pour la souveraineté alimentaire, le 16 octobre 2018, La Via Campesina a lancé un appel à ses organisations membres et alliées et à toutes les familles paysannes, afin de participer à l’action “adoptez une semence” (pour plus d’informations à ce sujet, lisez l’encadré 1). La première expérience était au Brésil et son organisation membre le Mouvement des Petits Agriculteurs (MPA).

L’échange mondial a été organisé au Brésil du 29 août au 4 septembre 2018, où une délégation de LVC a parcouru 1700 km à la visite de familles paysannes. Les délégués, venus de Corée, Costa Rica, Palestine, Suisse et du Zimbabwe, représentent des organisations qui sont déjà impliquées dans la conservation des semences au niveau de leurs pays. Lors de cet échange international, les délégués de LVC ont vu de près l’expérience du MPA (mouvement des petits agriculteurs) dans les états de Sergipe et de Bahia au nord-est du brésil, et le système de “maisons de semences” construites pour stocker les semences des communautés paysannes, chapeautés par une “maison mère des semences” qui stocke toutes les semences du territoire et sert également de lieu de production agricole et de formation. L’échange a été aussi l’occasion de débat et d’information sur les lois semencières, sur les pratiques agroécologiques et des expressions de la culture et l’art rural.

Ce 16 octobre 2019, qui est, rappelons le journée internationale de lutte pour la souveraineté alimentaire des peuples a encore été l’occasion d’un échange international de semences paysannes organisé en Palestine par l’Union des Comités d’Action Agricole (UAWC) et La Via Campesina. Des paysans venus des quatre coins du monde ont participé à l’échange : Honduras, Brézil, Puerto Rico, République Dominicaine, Afrique du Sud, Colombie, Pays Basque, Mozambique, Allemagne et Etats-Unis. L’UAWC est forte d’une grande expérience en matière de préservation des semences paysannes, et a créé sa première maison de semences il y a 17 ans à Hebron. La maison a pu sauver certaines variétés de l’extinction et défier l’occupation israélienne qui imposait des semences hybrides commercialisées par Bayer-Monsanto. Toutes les semences de la banque de l’UAWC proviennent des paysans, et passent un processus de vérification qui dure deux ans dans un laboratoire interne avant d’être redistribuées aux paysans (pour plus d’informations à ce sujet, lisez l’écho des campagnes 1).

Le prochain échange international de semences de La Via Campesina aura lieu en Corée en 2020. Des foires d’échange de semences sont organisées dans plusieurs régions du monde par les membres et les alliés du mouvement. L’action “adopte une semence” est un acte de solidarité, de résistance et de mysticisme qui doit être généralisé partout dans le monde, pour préserver les semences paysannes, base de notre agriculture et de notre vie.

Encadres

Encadré 1

Violence et capitalisme

La violence et le capitalisme ne sont pas étrangers l’un à l’autre, ils sont même jumeaux. Les conditions nécessaires à l’émergence du capitalisme aux XVe et XVIe siècles reposaient sur l’expulsion violente des paysan.ne.sdes terres communales en Europe ainsi que sur le pillage, le génocide et l’esclavage colonial dans l’hémisphère sud. Ce mélange toxique a produit ce que Marx appelle « l’accumulation primitive » de la richesse, qui a elle-même engendré le capitalisme.

De nos jours, à travers ce qui a été décrit comme « l’accumulation par la spoliation », la quête du profit à l’échelle mondiale voit un déploiement de la force dans le but de transformer en marchandises les terres et les ressources détenues en commun et qui pendant longtemps ont résisté au processus. Qu’il s’agisse des peuples autochtones en Amazonie, des petits exploitants agricoles au Honduras, des Massaïs protégeant leurs terres contre l’accaparement promu par le gouvernement dans le Serengeti, en Tanzanie, ou des millions d’Adivasis, ou peuples tribaux, qui défendent les forêts en Inde, l’alliance funeste entre l’expansion capitaliste et l’action de l’État conduit au déplacement de millions de personnes.

Le recours marqué à la force ne se produit pas uniquement lorsque le capitalisme s’étend et qu’il faut chasser les petits exploitants et les peuples autochtones se trouvant sur son chemin. Quand les populations ont la possibilité de faire appel à des institutions démocratiques pour obtenir des réformes de façon pacifique, les élites capitalistes et étatiques emploient souvent des méthodes sortant du cadre constitutionnel pour renverser le processus et préserver leur hégémonie économique et politique. S’en suit souvent un massacre, comme en Indonésie en 1965 et 1966, lorsque les efforts en faveur de la réforme agraire et d’une évolution parlementaire pacifique poussèrent les élites, dirigées par les militaires, à massacrer entre 500 000 et 1 million de personnes. Au Chili, dans les années 1970, les militaires noyèrent dans le sang la voie pacifique choisie par l’Unité populaire en tuant des milliers de personnes. Dans ces deux pays, même si la violence était tout aussi terrible dans les zones urbaines que rurales, elle était singulièrement brutale dans les campagnes et, ce, particulièrement à l’encontre des Indiens mapuches qui défendaient leurs terres communales au Chili.

Aujourd’hui, l’expansion capitaliste, la marchandisation et la préservation des systèmes d’hégémonie politique capitaliste s’associent pour promouvoir une nouvelle vague de violence mondiale. Aux Philippines, les consommateurs de drogues sont désignés comme boucs émissaires responsables des problèmes frappant le pays, lesquels découlent de l’alliance entre économie néolibérale et inégalités agraires extrêmes. Environ 27 000 d’entre eux ont ainsi été soumis à des exécutions extra-judiciaires au cours des trois ans et demi depuis l’arrivée au pouvoir du gouvernement Duterte. En Inde, les Musulmans ont été désignés « ennemis » de la « civilisation hindoue » par le BJP, scellant ainsi l’union entre économie néolibérale et nationalisme hindou et donnant lieu à des actes de violence collective contre les Musulmans, y compris de macabres affaires de lynchage.

Il est malheureux que de larges pans des classes moyennes aient adhéré à la rhétorique et l’idéologie du bouc émissaire promues par les forces de droite. Ce soutien de la classe moyenne, et même de la classe ouvrière, en faveur des forces racistes de droite s’accroît également dans l’hémisphère nord, où il cible les migrants, considérés comme responsables de la destruction des emplois, des inégalités et de la pauvreté qu’engendre la mondialisation menée par les entreprises. Le danger est que ce ressentiment des masses à l’encontre des migrants soit transformé par des démagogues tels que Donald Trump, les partisans du Brexit, Marine Le Pen en France ou Viktor Orban en Hongrie, en des mouvements similaires à ceux du fascisme traditionnel qui ont ravagé l’Europe dans les années 1930.

Plus que jamais, les exigences de justice et de paix nécessitent la création d’un front le plus large possible pour se dresser contre la violence capitaliste et fasciste.

Encadré 2

Contre le conservatisme : nous résistons pour vivre, nous marchons pour transformer !

Le conservatisme est essentiel à la montée de l’extrême-droite. Sa progression, au sein des gouvernements autoritaires du monde entier, joue sur l’idéal de la famille hétéro-patriarcale pour renforcer la division sexuelle du travail et la responsabilité des femmes dans le travail de reproduction de la vie. Les forces de l’extrême-droite s’en prennent au droit à l’avortement, persécutent les sexualités dissidentes, encouragent la violence et le harcèlement à l’encontre des femmes, institutionnalisent le racisme. Il s’agit d’un programme antiféministe qui, dans certains pays et territoires, est associé au discours contre l’Occident. Dans d’autres régions, il qualifie de « désordres » les actions menées par les femmes organisées au sein des mouvements de base. Ensemble, ces régimes exercent une violence brutale contre les femmes qui dirigent des processus de résistance.

Le capitalisme avance en piétinant le corps des femmes, leur travail et la nature, tout en renforçant le pouvoir des entreprises et en étendant la militarisation. Dans de nombreuses parties du monde, les femmes se trouvent au premier rang de la résistance. Elles ont prouvé leur grande capacité de mobilisation : le défi consiste à amplifier l’organisation permanente et populaire. Pour le relever, il faut lutter contre le capitalisme autoritaire et construire des processus capables de réorganiser l’économie, en plaçant au centre la durabilité de la vie. Et opposer au nationalisme notre internationalisme et la solidarité entre les peuples.

Pour les femmes, qui sont aujourd’hui la cible d’attaques, forger des alliances est plus important que jamais. Le néolibéralisme se présente en effet sous diverses formes, fragmentant les identités et dépolitisant des luttes historiques. Le féminisme n’est pas destiné à quelques-unes ; c’est un projet d’égalité, de liberté et d’autonomie pour toutes, réalisable seulement en opérant une transformation systémique, en garantissant la souveraineté et l’autodétermination des peuples. Les femmes se reconnaissent dans la résistance qui sauve des vies et préserve la communauté commune. C’est pourquoi le slogan choisi par la Marche mondiale des femmes pour la 5ème Action internationale en 2020 est « Résistons pour vivre, Marchons pour transformer ! »

Encadré 3

Réseaux sociaux : favoriser la haine tout en optimalisant les profits et le contrôle social

Fausses informations, manipulation de données, promotion de la haine, du racisme et de la misogynie. Il est de plus en plus clair que l’utilisation et les abus perpétrés par l’extrême droite sur les réseaux sociaux s’inscrivent dans sa stratégie de pouvoir. Non seulement pour remporter des élections, mais également dans le but d’encourager la normalisation de la violence en tant qu’élément de bon sens dont a besoin le capitalisme autoritaire pour s’imposer en détruisant les valeurs démocratiques.

De telles utilisations et de tels abus se produisent au sein d’infrastructures d’entreprise auxquelles se connecte une partie importante de la population, comme Facebook. Ces espaces ne sont ni publics ni démocratiques. Bien au contraire : algorithmes et portées sont définis par une entreprise pratiquant l’opacité et dont la richesse s’appuie sur la collecte et la manipulation des données. Son fonctionnement n’est ni rendu public ni remis en question, tandis que les utilisateurs sont tenus d’« accepter » les conditions générales de service alors qu’ils savent bien que Facebook se livre à des expérimentations en manipulant les sentiments, les besoins et les opinions, et en encourageant les extrémismes.

Les données sont transformées en capital. Or, les données ne sont pas là pour être collectées ; elles sont le fruit de la vie et des relations entre les personnes. Que ce soit à travers les applications pour téléphones portables ou les capteurs installés en ville, la surveillance de masse, coordonnée par les États et les entreprises, fait partie de l’optimisation des bénéfices. À ce titre, elle n’est donc pas isolée mais systémique.

Le racisme et la haine envers les pauvres et les femmes ne se multiplient pas seulement en tant qu’idées ; ils se retrouvent également au quotidien et génèrent une situation de fascisme social. Le virtuel se nourrit des vies concrètes de personnes luttant tous les jours contre des conditions de vie où la précarité et la violence sont croissantes. Le virtuel s’appuie sur une base matérielle, qui génère et a besoin de l’extractivisme, de l’énergie et des territoires pour stocker et traiter toutes ces données.

Développer une contre-hégémonie exige de notre part bien plus qu’une bonne stratégie de communication sur les réseaux sociaux. Il s’agit d’une bataille de longue haleine qui passe par l’élargissement de nos alliances anticapitalistes de sorte à collaborer avec celles et ceux qui luttent dans le domaine du numérique, dénoncent l’opacité et développent des technologies libres et non propriétaires.

Plus d’informations sur ce thème dans la newsletter Nyéléni num 37 sur La numérisation du système alimentaire.

Encadré 4

La production paysanne d’aliments, caillou dans la chaussure du système capitaliste

Défis et possibilités de lutte en faveur de la souveraineté alimentaire face à la vague conservatrice qui frappe le monde

C’est dans les champs, dans la production d’aliments, que se livre une partie importante de la lutte contre le système capitaliste. La montée de l’extrême droite dans plusieurs régions du monde entraîne une multiplication des menaces et des violations très graves des droits humains que subissaient déjà auparavant celles et ceux qui travaillent la terre.

Au Brésil, pays qui occupe la première place des taux de violence contre la population rurale, 1 678 paysan.ne.s ont été assassiné.e.s entre 1985 et 2003, selon les chiffres publiés par la CPT (Comissão pastoral da terra, Commission pastorale de la terre). Pour sa part, Global Witnessa indiqué que 2017 a été l’année la plus meurtrière dans le monde rural, depuis que cette ONG a commencé son travail de recensement, puisque 207 paysan.ne.s, militant.e.s de base, autochtones et écologistes furent tué.e.s.

Ces dernières années, l’agro-industrie est devenue la cause principale des conflits dans les campagnes. Les grandes multinationales agroindustrielles, la faiblesse des États (par inaction ou connivence) et les abus commis par les entreprises dans chaque pays ont renforcé plus encore un processus sanguinaire qui assoit le contrôle du capital sur les biens naturels avec la nouvelle vague fasciste mondiale.

« Si nous ne récupérons pas le contrôle sur nos communautés et territoires et si nous n’arrachons pas aux entreprises le pouvoir sur nos aliments, alors nous ne parviendrons pas à la souveraineté alimentaire » a averti le leader paysan Carlos Marentes, figure historique de La Vía Campesina (LVC) et représentant de l’organisation Proyecto de los Trabajadores Agrícolas Fronterizos (Projet pour les travailleurs agricoles frontaliers) en Amérique du nord.

Selon l’agronome féministe Miriam Nobre (Marche mondiale des femmes, Brésil), le néofascisme est représenté dans l’alliance unissant l’agro-industrie au trafic de drogues et à la militarisation, qui menace et spolie en permanence les populations locales, démantèle les politiques publiques et prétend revenir au modèle familial patriarcal pour que les femmes et les jeunes cessent d’être des acteurs clés du changement de système.

En Afrique australe, région confrontée aux régimes répressifs et aux autorités traditionnelles qui contrôlent les territoires et prennent des décisions retirant aux personnes leurs moyens d’existence, Mercia Andrews (Rural Women’s Assembly, Assemblée des femmes rurales) souligne qu’« il est important que les organisations, les mouvements paysans et les mouvements d’agriculteurs luttent contre ce niveau de violation de leurs droits. Dans beaucoup de cas, l’Assemblée des femmes rurales s’unie aux mouvements d’agriculteurs et paysans, et nous avons rejoint plusieurs campagnes revendiquant notre droit à dire NON. »

En Europe, le mouvement fasciste propose un « faux protectionnisme » et la xénophobie, prévient Andoni García, membre du comité de coordination ECVC. « À l’inverse, la souveraineté alimentaire constitue un frein au mouvement fasciste puisqu’elle parle de droits, de politiques publiques conçues à partir du droit à protéger les agricultures locales, les cultures paysannes, tout en respectant les droits individuels et collectifs, dans un esprit de solidarité et non de confrontation », ajoute-t-il.

Ce faux protectionnisme, qui bien souvent renvoie à des nationalismes exacerbés, Roma Malik y fait aussi référence et ajoute qu’il est important de relier la lutte en faveur de la souveraineté alimentaire menée par les organisations paysannes au droit à la terre. « Les entreprises [multinationales] arrivent en nombre, construisent des barrages, des centrales électriques, privatisent les rivières, abattent les forêts, assassinent les personnes ou les expulsent de leurs terres et de leurs maisons. En ce sens, la lutte pour le droit à la terre est aussi une lutte contre les gouvernements fascistes », indique-t-elle.

Carlos Marentes ajoute également que la souveraineté alimentaire « est l’un des objectifs pour faire face à la guerre lancée contre les pauvres, dans un système plus sauvage et prédateur que jamais qui s’emploie à veiller à ce que les multinationales contrôlent la production alimentaire, les moyens de production et la nature ».La clé réside dans le travail d’organisation et d’éveil des consciences pour défendre le droit à la vie, à l’alimentation, à la terre et à protéger les ressources naturelles.

Pour lire les entretiens dans leur intégralité, reportez-vous à la section « Aux premières lignes » de ce bulletin, page 4.

Sous les feux de la rampe

Un rapide aperçu des tendances politiques contemporaines

« Qu’on les qualifie de fascistes, de populistes autoritaires ou de contre-révolutionnaires, il ne fait aucun doute que des mouvements de colère méprisant les idées et les pratiques démocratiques et progressistes, et utilisant la force pour résoudre des conflits sociaux profondément enracinés se développent au niveau mondial. » Walden Bello, Counter Revolution, the Global Rise of the Far Right, page 3. Fernwood Publishing, 2019.

Pour la majorité d’entre nous, le fait d’être confronté à des régimes extrémistes autoritaires et violents, de lutter contre eux et de vivre sous leur domination n’est pas une nouveauté : les histoires de nombreuses sociétés/nations sont traversées de périodes où les dirigeants politiques associent et exploitent le charisme personnel, la ferveur religieuse, les insécurités économiques, la peur des « autres » et les promesses de restaurer des héritages glorieux (généralement imaginaires), afin d’imposer des régimes politiques qui privilégient certaines classes, confessions ou groupes sociaux particuliers, tout en s’attaquant aux droits et libertés fondamentales ainsi qu’à la dignité d’autrui. À de nombreuses reprises, dans le cadre de régimes coloniaux, d’apartheid, fascistes, militaires, dictatoriaux ou même démocratiques, nous avons été témoins de la manière dont la synergie toxique entre les intérêts liés à la classe, à la culture, à la religion et à l’idéologie peut engendrer l’oppression, l’extrême violence et la terreur.

Plus récemment, nous avons assistés à l’émergence de régimes autoritaires qui semblent être la conséquence des crises structurelles provoquées par le capitalisme néolibéral et, paradoxalement, découler des réponses apportées par des forces de gauche et des mouvements populaires progressistes aux ravages du néolibéralisme. Le néolibéralisme et la mondialisation menée par les entreprises ont non seulement échoué à apporter le bien-être social et économique à la majorité, mais ont également détruit l’environnement, affaibli les droits des travailleurs et des travailleuses ainsi que de celles et ceux pratiquant l’agriculture vivrière à petite échelle, miné les organisations ouvrières, exacerbé les inégalités et accru la faim et la malnutrition. À cause de la dérégulation financière et du choix d’accorder la priorité aux intérêts des entreprises plutôt qu’à l’intérêt public, l’épargne des classes moyennes et populaires a perdu en valeur tandis que leur dette a augmenté. Les gens se mobilisent pour demander le changement, mais deux tendances majeures permettent aux forces de droite de détourner ces demandes : 1) dans de nombreux pays, les forces politiques de gauche ont noué des alliances précaires avec les pouvoirs en place afin de se positionner dans le système politique ; 2) les forces de droite ont utilisé leurs propres ressources pour établir l’ère de la post-vérité, où la réalité est délibérément déformée dans le but d’influencer l’opinion publique et les comportements sociaux, ainsi que de renforcer le pouvoir des élites nationales et mondiales.

Alliées aux forces au pouvoir, les forces politiques de gauche se sont avérées incapables de démontrer en quoi leurs propres programmes et visions du changement étaient différents. Les champs politiques et idéologiques ont ainsi été livrés aux forces de droite, lesquelles ont exploité l’anxiété, la désillusion, la colère et le désespoir des millions de personnes malmenées par les crises économico-financières récurrentes, devenues la marque de fabrique du capitalisme mondialisé et de la mondialisation menée par les entreprises.

Bien que les forces de droite se soient présentées en critiques sévères du système actuel, elles ont nié l’implication du néolibéralisme dans les crises économiques et sociales et rejeté la faute sur des secteurs particuliers de la société, en les désignant selon des catégories de classes économiques, de groupes sociaux et de religion. Cela leur a permis d’obtenir le soutien d’un large éventail de classes et de groupes sociaux, y compris les classes moyennes et aisées, et de construire des mouvements basés sur les préjugés et la haine, sans pour autant toucher au système économique capitaliste. S’il est vrai que chaque régime est le produit de conditions historiques singulières à la région où il règne, l’on y retrouve, toutefois, les caractéristiques décrites ci-dessus à des degrés et des nuances variables.

Malgré une rhétorique qui prétend remédier à des conditions socio-économiques de plus en plus difficiles, ces régimes demeurent attachés au capitalisme et au néolibéralisme. Depuis leur arrivée au pouvoir politique, les conditions des classes ouvrières rurales et urbaines ne se sont pas améliorées ; les économies, revenus et emplois promis ne se sont pas non plus concrétisés. Mais, les entreprises et élites proches des régimes en place ont continué à obtenir des contrats leur permettant d’extraire les ressources, de construire de vastes projets d’infrastructures, de promouvoir l’agriculture industrielle et de favoriser le développement immobilier.

De nombreuses forces de droite sont parvenues au pouvoir grâce aux élections et revendiquent des mandats démocratiques pour promulguer des lois et des politiques au service de leurs programmes. Toutefois, ces forces sont opposées à une démocratie libérale dans laquelle tous les citoyens et toutes les citoyennes, sans distinction de classe, de culture ou de religion, jouissent des mêmes droits, des mêmes libertés et de la même égalité devant la loi, et où de solides partis d’opposition sont les garants du contrôle démocratique. Les menaces d’opposition politique que représentent les partis et les organisations sociales sont neutralisées par le biais du démantèlement de certains partis et la création d’alliances de circonstances avec d’autres, ainsi qu’en persécutant tout contestataire dans les médias ou par des moyens juridiques. Les processus démocratiques servent à établir des sociétés de la majorité au sein des quelles toutes les personnes identifiées comme des minorités sont privées de leurs droits, marginalisées et vivent dans l’insécurité.

La réinvention de la vérité et des faits, à travers la construction d’argumentaires présentant des réalités fictives, constituent des stratégies fondamentales pour les nouveaux régimes. Y figurent : le déclin de la nation et la nécessité de faire appel à des dirigeants forts pour ramener le pays à sa grandeur passée ;la supériorité raciale, religieuse et de genre ;les menaces pesant sur la sécurité, l’identité et la souveraineté du pays ; l’amélioration des conditions socio-économiques, etc. Ces argumentaires représentent des éléments essentiels pour que les régimes fascistes soient en mesure de consolider leur pouvoir, et ils sont relayés au public à travers les organes d’information généralistes, les réseaux sociaux, les manuels scolaires, les films, les programmes de divertissement et de service public. Ils fournissent les raisons à la criminalisation et à la violence extrême qui s’abattent sur ceux et celles qui sont présentés comme des ennemis/des menaces (groupes de population spécifiques, migrant.e.s, militant.e.s, avocat.e.s, journalistes, dirigeant.e.s de mouvement, etc.) ainsi qu’au maintien de la population dans un état d’incertitude et d’anxiété justifiant la « main de fer » indispensable pour préserver l’unité de la nation.

Les régimes autoritaires/fascistes menacent la souveraineté alimentaire car ils s’opposent aux droits fondamentaux, à l’égalité, à la diversité, à l’autonomie locale, à la coopération et à la solidarité. Ils soutiennent l’appropriation et le contrôle par le capital transnational des terres, de l’eau, des semences, des richesses naturelles, des ressources publiques et des systèmes alimentaires. Ils privent les populations locales de leur capacité d’action et censurent les voix et actions qui tentent de bâtir, en partant de la base, les démocraties des peuples.

Plus d’informations sur la situation en Asie ici.

L’écho des campagnes

L’écho des campagnes 1

La réforme agraire, une réponse à la pandémie actuelle

Jaime Amorim, membre de la Coordination Nationale du MST et de la Commission Internationale de Coordination de La Via Campesina

Aujourd’hui les drapeaux des luttes historiques comme le drapeau de la réforme agraire deviennent actuels, urgents et nécessaires. Une réforme agraire large, populaire et profonde qui résout définitivement le problème de la concentration des terres, en laissant à l’histoire le mal du latifundium et toute sa structure de pouvoir comme un vestige féodal qui reste au service de l’agrobusiness. Qu’il résout le modèle de développement des campagnes basé sur la monoculture d’agro-exportation.

La pandémie a démontré la fragilité du modèle capitaliste de développement, en particulier le modèle actuel, néo-libéral conservateur, qui détruit les économies locales, la souveraineté nationale, attaque la démocratie et les états démocratiques de droits, promeut les guerres contre les nations, supprime les services publics, avance rapidement sur les ressources naturelles et minérales, précarise la législation du travail, tout cela au nom du développement du capital, tout devient une marchandise au nom de la mondialisation de l’économie. En conséquence, en période de pandémie, le chômage, la faim, la misère, et la violence augmentent. Selon João Pedro Stédile, leader du Mouvement des Sans Terre (MST) du Brésil, dans une interview au journal Brasil de Fato “La pandémie de coronavirus est l’expression la plus tragique de l’étape actuelle du capitalisme et de la crise de civilisation que nous vivons.

La réforme agraire, large et radicale, peut devenir une réponse actuelle et moderne aux crises mondiales actuelles : crise politique, crise environnementale, crise idéologique, crise sociale et crise économique, qui est structurelle et ne peut plus résoudre les problèmes crées par la forme même de l’exploitation et de l’accumulation capitaliste, mais aussi ne peut plus répondre aux défis de la société pour sauver la survie des êtres humains, l’existence humaine peut être menacée et la vie de la planète elle-même. La réforme agraire avec l’agroécologie pour la souveraineté alimentaire et la sortie de la dépendance au marché et aux grands distributeurs alimentaires.

L’écho des campagnes 2

L’accaparement des terres, la justice foncière et les éleveurs

Lorenzo Cotula et Ced Hesse, IIED (Institut international pour l’environnement et le développement)

Au cours des 15 dernières années, l’évolution des prix des matières premières et les politiques publiques biaisées ont favorisé une hausse des investissements commerciaux dans les secteurs des ressources naturelles, notamment l’agriculture, les mines et le pétrole. Les gouvernements de différentes tendances politiques ont vu dans cette vague d’investissements une opportunité économique – pour promouvoir le développement économique, créer des emplois et générer des revenus publics.

Mais les accords ont également suscité des inquiétudes dans le public quant au mode de développement et aux types d’investissements, ainsi qu’à la manière dont les coûts et les bénéfices étaient répartis Plusieurs recherches ont documenté les conflits fonciers et la dépossession en lien avec les projets de plantation de l’agrobusiness et les opérations de l’industrie extractive. Plus récemment, les accords ont diminué en partie suite à l’évolution des prix des matières premières. Mais au niveau local, les pressions se font toujours sentir, en particulier dans les points stratégiques où sont concentrés les minerais, le pétrole, les terres fertiles, l’eau douce et les infrastructures. Plusieurs projets abandonnés ont laissé derrière eux une série de conflits, et de nombreux gouvernements identifient toujours les secteurs des ressources naturelles comme fondement de leur développement national.

Perçues à tort comme “vides” ou “oisives”, les pâturages ont longtemps été une cible pour les gouvernements et les entreprises. Dans la région de Karamoja en Ouganda, par exemple, les opérations minières ont empiété sur les terres de pâture (en anglais). Tandis que les bénéfices promis en matière d’écoles, d’hôpitaux, d’emplois et d’eau ne se concrétisent pas, les pasteurs perdent l’accès aux pâturages et aux gisements de minéraux et souffrent de la contamination de l’eau. L’exploitation minière limite également la mobilité des troupeaux et les prive de ressources clés en saison sèche. Ces évolutions compromettent cette pratique de pâturage et sa capacité de soutien en moyens de subsistance locaux.

Dans de tels contextes, des lois biaisées sapent souvent les droits des pasteurs et facilitent la dépossession. Bien que les faits montrent que les pratiques de pâturage sont résistantes et sophistiquées, les droits des pasteurs sur les ressources sont juridiquement protégés de manière variable et souvent limitée dans la pratique – y compris dans les pays où la législation ou même la constitution affirme formellement les droits locaux. Beaucoup de lois foncières conditionnent la protection effective à une “utilisation productive”, et les notions biaisées de productivité sapent les revendications des pasteurs en matière de ressources. L’absence de preuve légale de la propriété foncière des pasteurs aggrave souvent le risque de dépossession.

Nous avons besoin de politiques qui soutiennent, plutôt que de miner, les systèmes pastoraux, faisant avancer la justice foncière face à l’accaparement des terres. Bien que chaque contexte est spécifique, il est souvent nécessaire de reconnaître le pastoralisme comme une forme d’usage économique et écologique des ressources ; de protéger les droits collectifs des pasteurs à la terre, à l’eau et au pâturage ; et de faciliter la mobilité des troupeaux lorsque celle-ci assure la subsistance des pasteurs.

L’écho des campagnes 3

Femmes rurales, féminisme de base et droits fonciers

Maria Luisa Mendonça, Réseau pour la Justice Sociale et les Droits Humains, Brésil

Du point de vue des mouvements féminins de base, la défense des droits fondamentaux à la terre et à l’alimentation est une lutte constante. Dans le monde entier, l’expansion de la production agricole destinée à l’exportation, contrôlée par les grands propriétaires terriens et les grandes entreprises, déplace continuellement les communautés rurales. Elles sont forcées de quitter leurs terres et leurs moyens de subsistance, et deviennent vulnérables à l’exploitation du travail dans les grandes plantations ou dans les centres urbains. Elles doivent faire face à la pauvreté et la faim. Le monopole des terres et la spéculation mercantile font augmenter les prix des denrées alimentaires, ce qui affecte de manière disproportionnée les femmes à faible revenu. Le cas du Brésil illustre cette situation, car il présente un des niveaux les plus grands de concentration des terres. Actuellement, on assiste à une re-concentration croissante suite à la spéculation financière internationale sur les marchés fonciers ruraux. Ce processus accroît le monopole sur la terre et étend la monoculture de produits d’exportation, ce qui entraîne la destruction de l’environnement et le déplacement des communautés rurales qui produisent la majorité des aliments destinés aux marchés intérieurs.

Dans ce contexte, la résistance des femmes rurales est cruciale pour faire face simultanément aux crises économique, écologique et alimentaire. Les femmes font face à des défis spécifiques en temps de crise, puisqu’elles assument généralement la responsabilité des tâches sociales du ménage, comme l’alimentation et les soins de santé. Par conséquent, les politiques néolibérales réduisant le soutien gouvernemental aux programmes sociaux et l’augmentation des prix alimentaires représentent une charge supplémentaire pour les femmes qui travaillent. En outre, le déplacement des communautés rurales force les femmes à occuper les pires emplois dans les plantations et les zones urbaines.

Les mouvements ruraux de femmes qui militent pour la réforme agraire et l’utilisation commune des ressources naturelles, y compris les droits fonciers collectifs, seront importants. Les mouvements féminins de base font la promotion d’un nouveau système agricole basé sur les coopératives locales et la production alimentaire écologique. Il existe des mécanismes internationaux de défense des droits humains, mais il faut aussi de la solidarité. En Europe et aux États-Unis notamment, l’opinion publique est de plus en plus consciente qu’il faut soutenir une agriculture à petite échelle, locale et écologique. Pour étendre ce mouvement à l’échelle internationale, nous devons accroître la solidarité entre les organisations de femmes du Global Nord et du Global Sud, ainsi que dans les zones urbaines et rurales, afin de soutenir la production d’aliments sains à un prix abordable pour les femmes à faible revenue dans les zones rurales et urbaines. Nous avons besoin d’alliances solides pour transformer notre système alimentaire.

Résumé de Femmes rurales et féminisme de base.

L’écho des campagnes 4

Les travailleurs agricoles et la terre

Rosalinda Guillén, Développement de communauté à communauté, États-Unis

En tant que travailleurs et travailleuses agricoles, la valeur de ce que nous apportons à une communauté est simplement mise de côté. Nous sommes invisibles. Nos contributions sont invisibles. Cela fait partie de la culture capitaliste dans ce pays.

Nous sommes comme la lie de l’esclavage dans ce pays. Ils s’accrochent à cette mentalité d’esclave pour essayer de tirer profit de la main-d’œuvre la moins chère possible. S’ils nous maintiennent sans terre, si nous n’avons pas la possibilité de faire des racines dans les communautés comme nous le voulons, alors c’est d’autant plus facile de tirer le plus de profit de nous en investissant le moins possible. C’est aussi simple que cela. Nous devons nous intéresser aux travailleurs agricoles de ce pays qui possèdent des terres, où nous pouvons produire. C’est le changement dynamique dont nous avons besoin dans le système alimentaire. Nous savons tous que Cesar Chavez a parlé de la propriété des moyens de production. Je pense que beaucoup de travailleurs agricoles parlent de cela.

Être un peuple sans terre aux États-Unis, rend les travailleurs agricoles beaucoup plus vulnérable, et aux États-Unis, cela est facilement ignoré. Cela n’est même pas discuté au niveau politique ou social. Et on pourrait remonter dans l’histoire quand nos terres nous ont été retirées au Texas, en Arizona, au Nouveau-Mexique et en Californie. C’est un héritage de cette conquête, et nous l’avons accepté. L’idée n’est pas d’utiliser cela pour avoir de la terre. À quoi cela ressemblerait-il ? Je suis allé au Forum social mondial au Brésil et j’ai rencontré les dirigeants du mouvement des travailleurs sans terre. Nous continuons nos échanges depuis lors et ils sont venus nous rendre visite.

Nos discussions avec les dirigeantes du MST lors d’une récente visite à São Paulo nous font croire que nous sommes sur la bonne voie. Il est essentiel d’établir une base solide et audacieuse dans la communauté des travailleurs agricoles pour transformer l’agriculture et l’accès à la terre aux États-Unis. Nous apprenons constamment de la direction indigène de Familias Unidas por la Justicia. Poursuivre le dialogue et la réflexion sur les stratégies avec eux nous aidera à créer de nouvelles façons de faire avec les consommateurs, les marchés et le puissant lobby agricole.

D’autres stratégies, comme gagner suffisamment d’argent pour acheter des terres, ne suffisent pas. L’USDA a mis en place des programmes pour que les travailleurs agricoles latinos puissent posséder des terres. Mais vous vous retrouvez avec peut être quelques agriculteurs latinos qui pratiquent l’agriculture conventionnelle. Les travailleurs agricoles latinos deviennent des agriculteurs latinos qui embauchent des travailleurs agricoles latinos et les exploitent. Ce n’est pas bien. Ce n’est pas ce que nous voulons. Nous voulons changer tout le système. Donc que nous faut il pour cela ?

Résumé d’une interview de David Bacon dans Land Justice : Re-Imagining Land, Food, and the Commons in the United States

L’écho des campagnes 5

Alternatives et opportunités pour la justice foncière à Detroit

Malik Yakini, Réseau de sécurité alimentaire de la communauté noire de Detroit, États-Unis

Les communautés sont construites sur la terre, et nous – en tant qu’êtres humains – en tirons la plupart de nos aliments, fibres et matériaux. Dans notre société actuelle, ne pas posséder de la terre, c’est être sans pouvoir. Si nous espérons créer une société avec une justice possible, alors la question de la répartition du pouvoir et de l’accès à la terre est primordiale. Continuer à accumuler des terres entre les mains des mêmes individus, c’est l’antithèse de la liberté, et il faut lutter contre cela. La logique capitaliste traditionnelle voudrait que vendre la terre au plus offrant et attendre des retombées “goutte à goutte” soient les seules façons pour Detroit de sortir de ses luttes économiques actuelles. Il existe cependant, bien d’autres moyens, plus efficaces, pour renforcer la résilience économique et l’équité.

Il est difficile d’imaginer comment on pourrait arriver à une certaine justice foncière aux États-Unis, compte tenu du passé de vol et de dépossession des terres. Comment peut-on faire justice sans rendre les terres prises par les colons européens aux peuples indigènes ? Comment faire justice aux personnes d’origine africaine dont les ancêtres ont été réduits en esclavage et amenés sur ces terres contre leur volonté ? Faire justice avec des mesures de réparation pour ces actes historiques – est chose impossible pour le moment. Cependant, il existe des mesures qui nous faire progresser.

Dans les cas où les tribunaux peuvent prouver que les États-Unis ont violé des traités ou ont agi de manière frauduleuse, je pense que le gouvernement américain devrait restituer ces terres aux Amérindiens. Je suis également favorable à des réparations pour les Afro-Américains qui sont les descendants des ces Africains réduits en esclavage sur ces terres et qui avec leur travail ont créé une grande part de la prospérité de la nation. En outre, nous devons arrêter de confisquer les terres des agriculteurs afro-américains. Au moment où nous écrivons ces lignes (2016), des terres sont toujours injustement saisies aux propriétaires locaux et les agents du gouvernement sont complices dans cette affaire. Il faut enquêter sur ce phénomène et y mettre fin.

En outre, je pense que des “Community Land Trust” peuvent être établis pour permettre aux communautés d’exercer collectivement leur voix à propos de la terre dans leurs communautés et de jouer un rôle dans les décisions concernant les espaces verts, les projets industriels, le logement, ou tout autre chose qu’elles envisagent elles-mêmes pour le bien-être de leur communauté. Il est important de créer des politiques qui donnent l’accès à la terre au plus grand nombre par opposition aux politiques qui concentrent la propriété entre les mains de quelques-uns, et le soutien aux Community Land Trust pourrait jouer un rôle à cet égard.

Enfin, je pense que pour créer de bonnes analyses sur la question de la terre, nous devons comprendre l’histoire. Il est important de raconter la véritable histoire pour que les gouvernements, les ONG et les organisations communautaires puissent comprendre comment nous en sommes arrivés là. Pour ce faire, nous devons continuer à remettre sur le tapis les histoires de dépossession, de désautonomisation, de résistance et de pouvoir.

Résumé de Land Justice : Re-Imagining Land, Food, and the Commons in the United States.

Encadres

Encadré 1

Les nombreuses facettes de l’accaparement des terres

L’accaparement des terres n’est pas neuf. Mais ce qui est nouveau, c’est l’accaparement massif qui a eu lieu récemment depuis les crises financière et alimentaire de 2008.

“L’accaparement des terres prend différentes formes. Les femmes peuvent être expulsées de leurs terres à la mort de leur mari, les compagnies minières expulsent les paysans et les petits exploitants, ainsi que les plantations, les bases militaires et les projets écotouristiques. Les investisseurs ne sont pas seulement des multinationales ou des institutions financières, mais peuvent aussi être locaux et nationaux”.[Conférence paysanne Internationale : Stop aux accaparements de terres!]

L’accaparement des terres se produit aussi bien dans le Global Sud que dans le Global Nord, sous l’impulsion des élites locales, nationales et transnationales ou d’investisseurs financiers ou des gouvernements. En quête de profits nouveaux et croissants, de vastes étendues de terre sont soit prises de force, soit achetées à bas prix avec l’aide des gouvernements et des élites locales et nationales.

L’enjeu, c’est un changement majeur à savoir qui a le pouvoir de “décider comment la terre et l’eau peuvent être utilisées maintenant et à l’avenir”[L’accaparement de terres, Un livret.]. Le désir de remodeler la terre dans un but de profit conduit à une expansion globale de l’agro-industrie, à des plantations de différentes sortes, à de l’exploitation minière, des projets d’infrastructure et de nombreux autres types d’utilisation. L’agriculture paysanne et la souveraineté alimentaire sont continuellement menacées par des dangers, à mesure que des terres sont perdues et que les paysans sont pris dans des des chaînes d’approvisionnement mondiales.

Cependant, les paysans, les peuples indigènes et leurs communautés continuent de s’organiser et de se mobiliser pour défendre leurs droits à la terre et pour défendre une agriculture qui place l’alimentation, les gens et l’environnement avant les profits.

Encadré 2

Garantir les droits fonciers communautaires en Afrique

Dans un continent où 70 % de la population dépend de l’agriculture, l’accès assuré à la terre et aux ressources naturelles devrait être un droit inaliénable pour tous. Mais c’est loin d’être le cas.

La gouvernance coutumière des terres agricoles, des forêts et des pâturages par les chefs traditionnels des communautés a été annihilée par les lois foncières coloniales et post-coloniales, laissant les communautés rurales incertaines de leurs droits sur les terres dont elles dépendent pour leur alimentation, leurs moyens de subsistance et leur intégrité culturelle.

Les tendances récentes de l’urbanisation, de la croissance économique et des politiques néolibérales ont transformé les ressources naturelles en marchandises et créé des marchés pour la terre en tant qu’actif négociable. La crise financière de 2007/08 et la flambée soudaine des prix des denrées alimentaires et du pétrole ont entraîné un afflux massif de capitaux dans le secteur foncier. Entre 2000 et 2016, les gouvernements africains ont signé 422 accords fonciers à grande échelle avec des investisseurs, et ce pour dix millions d’hectares. L’accaparement des terres a été associé à de multiples violations des droits humains et à des injustices sociales, avec des milliers de communautés expulsées de force et laissées sans ressource. Les femmes et les jeunes, déjà désavantagés en matière d’accès et de contrôle de la terre, sont souvent les plus touchés.

En réponse à cette crise, des lignes directrices globales et continentales ont été mises en place pour établir des principes de bonne gouvernance foncière et définir des politiques protégeant les droits fonciers coutumiers et communautaires, notamment le Cadre et les Lignes directrices de l’Union africaine pour la Politique foncière et les Directives Volontaires des Nations unies sur la Gouvernance Responsable pour l’Occupation des Terres. Mais ces cadres politiques progressistes ont été largement ignorés aux niveaux national et local, où les décisions foncières sont effectivement prises. Ainsi, les droits d’occupation des populations rurales en Afrique, et en particulier des femmes, restent faibles et incertains.

Il est essentiel qu’une pression politique plus forte soit exercée pour accélérer l’institutionnalisation de politiques progressistes pour renforcer les droits fonciers communautaires. Les plaidoyers de la société civile doivent cibler l’Union africaine et les communautés économiques régionales pour qu’elles fassent pression sur leurs États membres afin qu’ils instituent les directives politiques progressistes. Du fait que les politiques du droit à la terre n’intéressent réellement qu’aux niveaux national et local, Il est d’autant plus important que la société civile fasse pression pour une législation nationale plus stricte en la matière et force les gouvernements à rendre des comptes à la Cour Africaine de Justice et des droits humains.

Nous devons promouvoir des systèmes de management pour l’usage des terres en communauté, en mettant en avant les preuves de succès évidentes permettant d’améliorer les moyens de subsistance de manière équitable et durable tout en protégeant et en restaurant les écosystèmes.

Les travaux récents de l’AFSA sur les droits à la terre portent sur une étude intitulée “Tendances politiques et nouvelles opportunités pour le renforcement des droits fonciers communautaires en Afrique”, et incluent des ateliers de renforcement des capacités pour la société civile et les organisations confessionnelles, et une série d’études de cas africains ainsi qu’un plaidoyer politique au niveau continental pour promouvoir l’usage communautaire des terres et des systèmes de management.
Nous devons tirer les leçons des principes de bonne gouvernance foncière de nos arrière-grands-parents qui nous ont légué la terre. Nous devons développer et adopter un usage et une gestion durable des terres qui répondent aux besoins de tous qu’ils soient : agriculteurs, bergers, chasseurs, pêcheurs, cueilleurs de fruits sauvages et animaux sauvages.

Pour plus d’informations, consultez le site www.afsafrica.org

Encadré 3

Le climat et l’accaparement des terres

Du point de vue de la base, il y a toujours eu un lien étroit entre les crises climatiques et environnementales et l’accaparement des terres. Par exemple, les causes des crises climatiques et des violations des droits à la terre sont les mêmes – un système économique basé sur l’extraction sans fin de ressources naturelles et où les industries minières tout comme l’agro- industrie et les plantations, y contribuent grandement. En plus, le lien est encore plus évident car ces mêmes projets d’entreprises à l’origine de ces crises sont également responsables des meurtres les plus documentés de défenseurs des droits humains en matière de terre et d’environnement.

Récemment, l’intérêt s’est accru au sujet de l’atténuation et l’adaptation de la terre et la nature au climat . Mais malheureusement, cela fait peser de graves menaces sur les droits collectifs des peuples sur leurs terres et territoires avec une nouvelle vague d’accaparement de terre pour des projets de conservation ; mais la menace vient aussi de la marchandisation et l’intégration de la nature dans les marchés financiers – ce que nous appelons la financiarisation de la nature.
Les “technologies à émissions négatives” (NET ), qui visent à éliminer le carbone de l’atmosphère, constituent un problème majeur. Les pays industrialisés et les entreprises émettrices comptent désormais sur les NET en raison de leur incapacité historique à réduire les émissions aussi rapidement qu’exigé selon les demandes de justice climatique.

L’un des schémas dominants de ces NET consiste à cultiver et à brûler de grandes surfaces d’arbres et de cultures pour la bioénergie, puis à stocker le carbone émis dans des bunkers souterrains. C’est ce que l’on appelle la bioénergie avec capture et stockage du carbone ou BECCS. Selon les estimations, la BECCS pourrait nécessiter jusqu’à 3000 millions d’hectares de terres dans le monde. D’autres options pour les NET sont appelées “solutions climatiques naturelles” ou “solutions basées sur la nature”, incluant la restauration des forêts, le reboisement et le boisement. Chaque option aura des effets différents sur l’environnement, les terres et les droits des peuples, selon qui les contrôle et leur mise en œuvre.

Les entreprises considèrent déjà les solutions basées sur la nature comme une opportunité pour compenser leurs émissions. Les compensations permettent aux grands pollueurs historiques comme les compagnies pétrolières de continuer à polluer en transférant leur responsabilité de réduction des émissions avec des projets de conservation dans les communautés du Global Sud. La compensation ne réduit pas les émissions globales et exacerbera donc les effets du climat sur les terres. C’est aussi injuste car cela maintient et étend le contrôle des territoires par les plus responsables du changement climatique. La compensation équivaut à un double accaparement de terres, car les entreprises finissent par contrôler l’utilisation des terres à deux endroits : le site qu’elles détruisent et celui qu’elles déclarent comme compensation.

D’autre part, des solutions décentralisées aux crises de l’environnement et de l’accaparement des terres sont possibles : elles seraient basées sur un contrôle écologique et autonomes et une gouvernance par les populations autochtones, par les peuples des forêts, par les petits producteurs sur leurs propres terres et territoires – comme l’agroécologie pour la souveraineté alimentaire et la gestion communautaire des forêts – . Elles gagnent en importance comme solutions pour la justice environnementale. La gestion communautaire des forêts et des territoires est le meilleur moyen de préserver les écosystèmes tels que les forêts, les mangroves, les zones humides et les plans d’eau. L’agroécologie refroidit le climat en supprimant le besoin d’énergies fossiles, en recyclant les nutriments dans les fermes, en relocalisant les systèmes alimentaires et en arrêtant la destruction de l’environnement pour la production de produits agricoles à des fins lucratives.

Comme toujours, il est vital que les mouvements pour la justice foncière et la justice environnementale travaillent ensemble pour dénoncer les fausses solutions et démontrer notre propre vision pour un futur juste.

Sous les feux de la rampe

Les nouveaux accapareurs de terres à l’échelle mondiale : Wall Street

Depuis la crise financière de 2007-2008, les terres agricoles sont devenues de plus en plus un actif financier important pour les entreprises, ce qui a suscité à la fois des protestations massives de la part des organisations de paysans et une attention significative de la part des institutions internationales. Mais si les efforts de marchandisation des terres agricoles ne sont pas nouveaux, le dernier chapitre de l’histoire de l’accaparement des terres présente des différences marquées : de nouveaux défis apparaissent ainsi que des répercussions sur le plan géographique et des opportunités de solidarité internationale et intersectorielle.

Nouvelles géographies, différentes tactiques, mêmes entreprises

De manière globale aussi bien au Sud qu’au Nord, l’accaparement des terres s’accélère et s’étend souvent avec des liens financiers avec des investisseurs institutionnels du Nord. Les fonds de pension nord-américains et européens et les fondations universitaires investissent des fonds importants dans des projets agricoles à grande échelle dans des régions comme le Cerrado brésilien, où les communautés sont déplacées, les défenseurs des droits à la terre assassinés et les forêts brûlées pour l’agroindustrie [“L’accaparement des terres agricoles au Brésil par Harvard et la TIAA part en fumée.“]. Pendant ce temps, les petits agriculteurs d’Europe et d’Amérique du Nord continuent à se débattre contre les prix extrêmement bas et les coupes dans les filets de sécurité sociale, ce qui les rend vulnérables à l’accaparement des terres par bon nombre de ces mêmes investisseurs institutionnels.

Alors que l’exploitation des institutions faibles et de la corruption est au cœur de l’accaparement violent des terres dans des endroits comme le Cerrado brésilien, dans le “Global Nord” ce sont des institutions en bonne santé qui soutiennent des tactiques d’investissement de type “prédateur”. Des sociétés financières comme la caisse de retraite américaine TIAA et la dotation de l’université de Harvard ont dépensé des dizaines de milliards de dollars, dont une grande partie provient des fonds de pension des travailleurs du secteur public comme les enseignants, pour acquérir des millions d’hectares de terres agricoles dans des endroits comme l’Illinois et le Mississippi aux États-Unis. Bien que la TIAA soit devenue le plus grand propriétaire institutionnel de terres agricoles au monde, ses objectifs ne visent pas la production alimentaire, mais plutôt sur la spéculation sur la terre et d’autres inputs agricoles essentiels. Bien que ce ne soit pas strictement illégal, le fait que les entreprises ciblent des agriculteurs en détresse financière est une tactique prédatrice qui conduit les agriculteurs à vendre leur seul moyen de subsistance : leur terre.

L’accaparement des terres en Amérique du Nord pourrait augmenter de façon dramatique dans les années à venir. Des décennies de discrimination institutionnelle continue ont laissé de nombreux agriculteurs noirs avec des titres de propriété informels et un statut incertain qui les rend particulièrement vulnérables aux spéculateurs et aux investisseurs fonciers [Atlantique (en anglais)]. Les terres indigènes restent constamment menacées. Les petits agriculteurs en général luttent en Amérique du Nord, car les sociétés agro-industrielles deviennent plus grandes et plus puissantes ; au cours des 15 prochaines années, la moitié des terres agricoles aux États-Unis et au Canada devraient changer de mains, à mesure que les agriculteurs prendront leur retraite. Si rien n’est fait, une grande partie de ces terres pourrait se retrouver entre les mains d’investisseurs et d’entreprises.

Pistes à suivre

Depuis des décennies, les organisations d’agriculteurs et leurs alliés plaident pour des réformes politiques clés visant l’accaparement des terres dans les pays du Nord et du Sud, comme : le renforcement des droits à la terre des communautés marginalisées (comme la propriété des héritiers aux États-Unis, ainsi que les droits à la terre des communautés indigènes et des travailleurs agricoles sans terre) ; la restriction de la propriété foncière des entreprises ; et la mise en œuvre de politiques garantissant un prix juste aux petits agriculteurs pour les maintenir sur leurs terres. Les travailleurs pensionnés en particulier en Amérique du Nord et en Europe, peuvent agir en solidarité avec les agriculteurs et les paysans du monde entier en s’assurant que leur argent n’alimente pas ces pratiques d’accaparement des terres et de spéculation risquée. Ensemble, ces efforts permettront de renforcer les communautés rurales et de protéger la stabilité financière des travailleurs.

Pour plus d’informations sur l’accaparement des terres par les investisseurs institutionnels, consultez le site ici.